Répondre à: Dragons 2, l'apologie du paternalisme bienveillant

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#9663
GoG
Invité

Bonjour,

(Trigger Warning : spoilers Dragons 2 et Kaguya Hime)

Quand j’avais vu votre premier commentaire je m’étais fait la réflexion que vous aviez parfaitement résumé le film sans même l’avoir vu.

En tout cas votre verdict final me rassure, étant donné les commentaires enthousiastes que j’avais pu entendre ici et là, je finissais par me demander si je n’en faisais pas trop ou si des éléments progressistes m’avaient (très sournoisement) échappé. Ceci dit, nous étions 3 à avoir vu le film et 3 à en être sortis cruellement déçus.

Pourtant il me semble que le film partait mieux qu’il n’a fini. Il y avait clairement du spécisme latent (mais le 1 ne m’en semble pas dépourvu) mais à tout le moins, la relation Astrid/Hiccup possédait des éléments égalitaires encourageants.

Leur scène très complice du début était très sympathique au bémol près qu’elle se clôture sur Astrid rassurant les angoisses existentielles de son (futur) hommen. Cela ne m’aurait pas plus dérangé que ça s’il y avait eu la réciproque à un moment ou à un autre, mais de réciproque hélas, il n’y en a pas.

Il en va de même pour Valka dont le traitement est, il m’a semblé, particulièrement cruel et très réactionnaire. Pareil, le début m’a semblé intéressant : la mère qui abandonne sa famille pour raison politique (et soit dit en passant, parce que son hommen de chef est un connard qui oppresse une autre race (les dragons) sans prendre en compte une seule seconde son point de vue à elle) ne semble pas jugée et l’on découvre avec intérêt que Hiccup tient (pour l’instant) beaucoup plus de sa mère lunaire, inventive et passionnée. Où l’on se prend aussi à imaginer qu’il déclinera sa « carrière » d’Hommen en chef pour, soyons fous, mener des recherches socio-politico-draconiques avec sa mère.

Hélas, quand le père retrouve Valka il me semble que le film bascule absolument et, si il n’y a pas un mot de reproche énoncé à l’égard du comportement de Valka, symboliquement le film lui fait payer plutôt deux fois qu’une sa décision.
Alors que Valka tente de s’expliquer par rapport à ses choix de vie, Stoik ne l’écoute pas une demi seconde, la coupe et vante sa beauté.
Sur cette remarque toute en finesse du patriarche, le film fait rentrer Valka dans le girond hétéronormé, elle redevient la mère et la femme aimante qu’elle, on nous le fait comprendre sans trop de subtilité, aurait toujours dû rester.

Détail hautement symbolique qui a hélas son importance : Valka ne fait pas la cuisine. Mais ce n’est pas (du tout) dans un souci de répartition des tâches domestiques (Stoik ne la fait pas plus), mais parce qu’elle ne sait pas cuisiner !
En effet, Valka aurait été ravie de faire la cuisine à son Hommen si elle en avait eu les compétences. (Et là on se dit que le long combat de la répartition des tâches ménagères est encore bien loin d’être gagné)

Il y aurait plein d’autres choses à dire de ce passage en particulier et du film en général, qui une fois ces « retrouvailles » achevées se vautre dans l’apologie du chef la plus sordide : la symbolique (toute en légèreté) du combat des mâles alphas sous le regard admiratif de leurs femmes qui ne jouent plus aucun rôle à part celui de support affectif, Valka qui incite son fils à assumer le statut héréditaire qui lui revient de « droit », le racisme insupportable, le spécisme le plus primaire relayant les dragons au rang d’automates au service de leurs maitres, ad nauseam.

Je ne suis même pas sûr d’aller voir le troisième volet pour voir s’ils arrivent à remonter une barre largement en dessous de zéro sur mon échelle de tolérance. En tous cas, j’irai prendre la température sur le site en espérant qu’une bonne âme se dévoue. 😉

Pour me consoler j’ai été voir Kaguya Hime qui est pour le coup vraiment remarquable.
Il m’a semblé que Takahata avait fait quelques emprunts à Arite Hime d’ailleurs (que nous avons découvert grâce à vous!), d’autant que la Kaguya Hime de Takahata ne suit pas exactement le conte originel, notamment dans les personnages du père, de l’empereur (et j’irai jusqu’à dire de Bouddha), montrés sous un jour très oppressif.

Contrairement à Arite Hime par contre, Kaguya Hime est particulièrement désespéré à y bien regarder et c’est, ce me semble, l’œuvre la plus amère de Takahata.
Il y aurait beaucoup à en dire car l’anime est complexe et très en finesse et il mérite facilement un second visionnage. (de toutes façons c’est graphiquement une pure merveille). J’avance toutefois l’hypothèse que Kaguya représente une incarnation de la bodhisattva Kannon, qui est structurellement considérée dans la société japonaise comme l’épouse de Bouddha (c’est plus complexe que cela, mais cette symbolique est malgré tout très puissante).
Si mon hypothèse n’est pas totalement infondée, cela jette une ombre d’autant plus amère sur un tableau final déjà bien lugubre… Qu’en pensez vous ?

Je partagerai cette interprétation sur le fuseau approprié mais après une deuxième vision, je serai curieux d’avoir l’avis des habitué.e.s à ce niveau, s’il y en a qui s’y connaissent également en mythologie bouddhiste japonaise. 🙂

Sur ces considérations réjouissantes, au plaisir,

GoG

PS: peut-être peut-on se tutoyer, si cela ne vous dérange pas?

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