Répondre à: Pourquoi la chanson "Je ne dirai rien" de Black M est répugnante.

[Arroway]

Bonjour,

Meg, j’ai lu cet article, très intéressant mais encore une fois , je n’arrive pas a m’identifié au personnage, le mansplain comme il est nommé ( mais c’est vrai, j’ai appris un mot ).En effet, loin de moi l’idée de vous expliquer comment agir et lutter pour l’égalité hommes/femmeS . Encore une fois, je n’ai donné qu’un avis que sur la CHANSON.

Si je reviens un peu arrière dans tout ce qui a été écrit sur ce fil par flo en l’occurrence, je peux lire des choses du genre :

les filles qui aiment être jolies n’ont pas à se sentir visées par cette chanson car les attitudes décrites dans celle ci ne concerne ( comme dit plus haut dans mon commentaires ) qu’une MINORITE d’entre elle .

Dire « les filles qui aiment être jolies n’ont pas à se sentir visées », c’est clairement une injonction pour dire aux femmes comment elles sont censées réagir ou pas à la chanson.

Dans le premier post, tu demandais :

Pourquoi s’acharner sur cette chanson? Vous sentez vous visés?

Nous nous sentons visées parce que les insultes et les menaces proféréees par la chanson sont des insultes et des menaces utilisées de manière habituelle envers les femmes, quelles qu’elles soient : menaces de viol, slut-shaming (pour rabaisser un homme, on le traite de femme ou d’homo, pour rabaisser une femme, on la traite de pute/salope), fat-shaming (dans une société où les femmes sont objectifiées pour leur physique). C’est tellement courant qu’il suffit de sortir marcher dans la rue ou prendre les transports pour devoir y faire face.

Ce discours est souvent justifiée par le fait que les femmes en question se comporteraient “mal” (“elle l’a cherché, elle l’a bien mérité”). Outre que ce processus de culpabilisation des victimes est problématiques, il semble évident que le matérialisme et la cupidité ne sont pas des caractéristiques féminines : des hommes sont aussi matérialistes, cupides, etc. Pour autant, se voient-ils proférer – qui plus est par des femmes – des menaces d’agressions physiques et sexuelles, se font-ils traiter de prostitués, les insulte-t-on sur leur physique ?
Il me semble que la réponse est non dans l’immense majorité des cas (au contraire même, puisque les valeurs matérialistes de notre société et avoir de l’argent sont louées, et particulièrement appréciées chez les hommes comme signe de virilité).

“Oui”, me répondra-t-on, “mais les hommes ne se font pas entretenir par les femmes, eux”.
Et j’ai envie de dire : et pourquoi donc, tiens ? Parce qu’historiquement et culturellement, les femmes n’avaient pas le droit de gagner de l’argent pour elles-mêmes et produisaient un travail ménager non-rémunéré financièrement au sein du foyer. Les hommes, à l’inverse, étaient considérés comme étant le chef devant faire vivre financièrement leur famille. Or, qui dit métier rémunéré, dit indépendance financière et liberté de quitter son couple quand cela va mal… ce qui était très problématique pour les femmes qui ne pouvaient espérer trouver par la suite un métier suffisamment payé (parce que les employeurs ne voulaient pas payer les femmes, vu que ce n’était pas leur rôle… le serpent qui se mord la queue) pour subvenir aux besoins de leurs enfants dont elles avaient très souvent la charge et elles-mêmes.

Ces pratiques étaient également présentes avant le mariage, pendant les flirts : les femmes n’étant pas censées travailler et gagner d’argent puisque destinées à devenir de bonnes épouses, ne pouvaient certainement pas payer pour les dépenses pendant les rendez-vous… Une fille devait être jolie et en bonne santé pour faire des enfants, un garçon devait être en mesure de subvenir aux besoins de la future famille…

De nos jours, d’un côté comme de l’autre les pratiques ont (heureusement) évolué. Mais il reste des pratiques plutôt tenaces (des hommes qui n’aiment pas que les femmes leur offrent un resto parce que cela ne fait pas très viril, et des femmes qui s’attendent à ce qu’onleur paye beaucoup). Il ne faut pas non plus oublier une autre dimension : le fait que les revenus des femmes restent encore, en moyenne, inférieurs aux revenus des hommes (des chiffres ici : http://www.inegalites.fr/spip.php?article972)

Et si je reviens sur l’idée de se faire « entretenir », on peut très bien considérer que les hommes continuent encore majoritairement à se faire entretenir par les femmes dès qu’il s’agit du travail ménager, des repas, et du soutien émotionnel. Pourtant, on ne vient pas les insulter et les menacer de viol pour ça.