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#34262
Sam
Invité

montrer comment même des éléments positifs, qui nous paraissent aller à l’encontre de l’antisémitisme (ou d’une autre oppression), sont facilement récupérés.

Oui, je suis d’accord, mais justement, la question c’est : est-ce que ce qui est exprimé, que ce soit des clichés réutilisés ou n’importe quoi, fait bien ce qu’on aimerait que ça fasse, à savoir mettre en avant la domination pour ce qu’elle est ?

Hum … Oui clairement il ne met pas en avant de processus de domination, il ne dit rien de l’antisémitisme, il en fait presque abstraction (si je me souviens bien). Du coup, est-ce que cette position ne peut pas, passivement renforcer l’antisémitisme avec cette affirmation décomplexée d’une culture juive ? « Une oeuvre d’art sur les anormalités de l’existence juive tribale » qui « expose les goys au secret juif à travers le grand écran » ? (pourquoi tribale d’ailleurs ? une petit clin d’oeil pour montrer qu’il est raciste en plus d’antisémite ?)

En fait je pense que Atzmon, et les antisémites en général, voit ça parce qu’il cherche ça dans tout film fait par des juifs parlant des juifs. Le spectateur lambda lui, il s’identifie au personnage, il est à la place, avec le héros tout au long du film. Il va associer ça avec des éléments de sa propre culture, se reconnaitre dans plein de trucs, etc. Et finalement une oeuvre où le spectateur se sent juif tout du long, pour moi ça lutte contre l’antisémitisme.

(D’ailleurs dans Gentleman Agreement c’est pas ça du tout et on ressort avec une impression très extérieur du genre « oh les pauvres juifs, ça n’a pas l’air facile » ….)

Plus généralement je me dis que l’oppression peut être complexe, située dans une histoire, dans un contexte particulier, elle n’empêche pas l’existence d’autres oppressions contradictoires, mais une oppression donnée, comme phénomène social, n’a sa source que dans l’oppresseur.

Pas besoin de Juif pour faire de l’antisémitisme. C’est un phénomène indépendant des Juifs.

Ca n’empêche pas que divers phénomènes d’oppressions contradictoires s’exercent sur des individus. Surtout que la culture, le lieu de vie, l’identité, la condition d’un individu peuvent changer dans sa vie. Il y a donc toujours des voies de sortie individuelles mais ça ne change rien à l’existence d’un phénomène social dans un espace donné à un moment donné.
Du coup la misogynie intériorisée, la haine de soi, etc je verrais ça comme des symptomes plutôt que des causes …. Ca me fait penser à la figure du Kapo. Selon que tu considères le Kapo comme un oppresseur ou comme un opprimé, ça change pas mal ta vision des choses….

Je pense que le patriarcat « veut » avant tout continuer de perdurer et qu’il s’accommode très bien d’un grand nombre de choses. C’est pour ça que je parle de dynamisme, du fait que le féminisme doit tout le temps s’actualiser. Le patriarcat, lui, intègre sans problème nombre d’éléments féministes à sa sauce.

Voui. Finalement c’est moins la manière (toujours récupérable) qui compte que le résultat : je fais ce que je veux.

[TW viol]

Je me rappelle une discussion que j’avais eu avec une pote féministe. On parlait des viols en milieu féministe, et on était en train de déprimer de la fréquence monstrueuse à laquelle l’une de nous était agressée sexuellement ou violée, y compris par des mecs trop cool trop pro-féministes. Moi ça m’est arrivé, un mec trop bien déconstruit m’a violée, ainsi qu’une bonne dizaine d’autres meufs, comme je l’ai appris plus tard (et probablement bien d’autres femmes). Comme il maîtrisait le vocabulaire féministe, il avait un discours aussi subtil que gerbant. Il dissertait ainsi sur le fait qu’il attendait toujours un « oui » et c’est vrai, sauf qu’il l’obtenait par manipulation, pression, insistance, menaces. Quand on lui disait qu’un « oui » obtenu par de tels procédés n’en était pas un, il partait en envolées lyriques sur est-ce qu’un consentement est possible en contexte patriarcal, comment c’est triste et navrant de voir à quel point le cerveau des femmes a été lavé, que « oui » et « non » ne veulent plus rien dire, et que face à ces dégâts, la meilleure chose qu’il puisse faire en temps qu’allié, pour respecter les femmes, les traiter en adultes, c’était de les croire sur parole quand elles disent « oui ». Face à une telle avalanche constituée d’éléments proches de ce que moi j’ai pu dire si on les prend séparément ou dans d’autres contextes, avec la pote féministe dont je parlais plus haut, on a fini par exploser de rire, nerveusement. « T’as l’impression de leur avoir préparé le boulot, genre tu coupes les petits légumes et ils les font cuire », qu’on disait. Mais c’est exactement ça. La prochaine fois, je ne sais pas quelle forme ça prendra, peut-être ce que j’écris maintenant sera utilisé.

Je crois que je suis contre les « alliés ». Finalement ça n’existe pas. Un mec c’est toujours un oppresseur en puissance. Voire un oppresseur tout court. Parce qu’il ne perdra jamais les privilèges de sa situation. Sauf à ne plus être un mec.

Du coup se faire aider par un oppresseur c’est déjà risqué. Enfin je crois. On peut accompagner peut-être, essayer de prendre conscience de ses privilèges, faire un travail sur soi et …. éviter au maximum d’opprimer . Et c’est tout. « La meilleure chose qu’un homme puisse faire pour respecter les femmes » c’est … de les respecter. Et de pas geindre en disant que c’est compliqué pour un homme de respecter une femme parce que tu comprends la patriarcat a fait que les femmes sont devenus incompréhensibles ….qu’elles ne savent pas consentir …. bla bla ….

C’est compliqué pour un homme de ne pas oppresser manipuler dominer dans une société qui lui a appris à le faire ? Et alors ? Il a tous les outils dans ses mains pour y arriver. Débrouille toi.

(Bon je ne développerai pas mais « traiter en adulte » quelqu’un …. bon ….. c’est pas archi le sujet de ce site mais faudrait parler un peu de la domination adulte … et de son expression dans des milieux pourtant sympatoche …. l’enfance c’est là où on apprend que ton corps ne t’appartiens pas (gouzi gouzi mon petit, je te tripote si je veux, même si je suis un type dans la rue et que tu ne m’as jamais vu) , que t’as pas à comprendre les règles qui s’appliquent à toi (« ça suffit, c’est comme ça et pas autrement ») , que d’autres gens savent mieux que toi ce qui est bien pour toi (« c’est pour ton bien »), etc etc etc … Du coup, c’est peut-être significatif que ce mec utilise cette catégorie …)

il ne faut pas non plus transformer les opprimé.e.s en victimes christiques, où on retombe dans quelque chose d’essentialisant.

Ouai, là tu touches un point qui me travaille …. Surtout qu’étant assez pauvre en identités opprimées ça me renvoit au profit que je tire à me définir en creux comme non-opprimé ….

Une piste d’idée …. « Victime » serait peut-être un statut individuel, par exemple un mec qui se fait battre par sa femme, ben c’est bien une victime. Mais ça reste un membre d »une catégorie dominante. Il continue, tout battu qu’il soit, et même s’il est aussi handicapé, noir, juif, schizophrène, homosexuel à profiter de sa condition masculine, il en profitait avant de se faire battre, et il en profitera après pour se reconstruire.

Une femme dans sa situation, toutes choses égales par ailleurs, aura plus de difficultés …

Donc si on inverse, être femme, appartenir à une catégorie « opprimée », ça ne veut pas du tout dire être une victime. Il y a plein d’espaces et d’opportunités pour se défendre, pour gagner en puissance, etc. Et plein d’exemple. Ca ne change rien à l’existence d’un phénomène social de domination.

Bref pas besoin, je crois, d’imaginer une part de responsabilité, même minime, d’un groupe à sa domination…

Tout ça est quand même très théorique…

Sinon t’as vu passer cet article sur les hommes féministes ?

http://lmsi.net/Quand-il-s-agit-des-femmes-y-a-t

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