Répondre à: Critique ciné – Full Metal Jacket

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#13884
Paul Rigouste
Participant

« De « vagues souvenir » suffisent-ils pour étayer une théorie ? quelle qu’elle soit ? Ou votre message n’est il que la démonstration d’une démarche où l’idée précède la démonstration ?! »

Vous avez de la chance, vous, si vous démontrez vos idées avant de les avoir. Personnellement, je ne suis pas aussi génial, j’ai d’abord des intuitions, des pressentiments, à partir desquelles je fais des hypothèses (que je formule avec des pincettes, comme c’était le cas dans mon premier post), et après seulement j’essaie de les « démontrer » (du moins j’essaie de voir si elles se vérifient empiriquement ou pas). Donc si vous permettez, je vais procéder à mon rythme : commencer par des hypothèses, puis essayer de voir si elles se vérifient ou non. Ça va être un peu ennuyeux pour vous qui détenez déjà la Vérité sur l’œuvre de Kubrick, mais je vous en prie, soyez indulgents avec nous-autres simples mortel-le-s.

« Pourquoi diable se préoccuper d’étayer ce qu’on dit, une impression, un on-dit et deux rumeurs plus loin, on pendra n’importe qui pour n’importe quoi. »

Ne vous inquiétez pas, je ne vais pendre personne, je me contente d’avancer des hypothèses 🙂

« Les deux en ont bavé. McDowell pour la séquence avec les écarteurs de paupières, O’Neal pour la scène où son enfant meurt et où il raconte l’histoire, il aurait répété la scène un nombre incroyable de fois jusqu’à être physiquement brisé. »

Je ne pense pas qu’il n’y ait que les rapports de sexe qui puissent expliquer le comportement d’un cinéaste vis-à-vis de ses acteurs et actrices. Donc le fait que Stanley Kubrick ait pu être horrible avec des hommes qui travaillaient pour lui n’est pas pour moi une preuve de son absence de misogynie. Et, de plus, il pourrait être intéressant de savoir plus précisément comment Kubrick s’est comporté vis-à-vis de Duvall, O’Neal, et McDowell. Peut-être que ce vous mettez sur le même plan n’avait concrètement rien à voir (attention, ceci n’est qu’une hypothèse…).

« Expliquez nous en quoi son rapport avec les actrices prouve une misogynie certaine, expliquez nous que Marisa Berenson a été outrée par son comportement, que Shelley Duvall a été scandalisée par la manière dont elle a été traitée, que Miriam Karlin, Shelley Winters, Suy Lyon ou Nicole Kidman ont été choquées par l’attitude méprisante de Kubrick vis à vis de leur personne… »

Non seulement ce n’est pas parce que des femmes ne se plaignent pas du comportement d’un homme (ou que l’on n’entend pas parler d’un tel témoignage éventuel) que cet homme n’est pas misogyne, mais de plus, je ne pense pas que les rapports de sexe expliquent tout (il y a plein d’autres paramètres à prendre en compte), ni que la misogynie s’exprime toujours de la même manière (en l’occurrence de la torture psychologique). Attention, ceci n’est également qu’une hypothèse.

« Après moi j’ai rien contre l’idée qu’il soit misogyne, lui, et ses films en plus. J’avais vu une interview de sa femme qui balayait cette accusation, la jugeant débile… »

Ah, si sa femme le dit alors ça doit être vrai.

« Reste son oeuvre, des gens l’accusent d’être misanthrope également…
Il n’aimerait pas les femmes, il n’aimerait pas les gens en fait. »

Personnellement, je me méfie un peu de ce qualificatif de « misanthrope », car j’ai l’impression que c’est souvent un moyen de dissimuler un mépris pour une classe beaucoup plus précise que « l’humanité en général ». Je pense par exemple à la soi-disant misanthropie d’un Lars Von Trier ou d’un Léo Ferré, qui dans les faits, ressemble bien plus souvent à de la misogynie qu’à de la misanthropie. Mais bon, il ne s’agit encore que d’une hypothèse, excusez-moi.

« Après vous pouvez toujours soutenir l’idée que Kubrick est misogyne, parce qu’il n’y a pas, ou peu, de femmes dans son cinéma. Mais défendre cette idée avec Duvall ou la femme aux chats, c’est, au mieux, hors sujet. »

Merci, donc on est d’accord qu’un réalisateur qui s’intéresse principalement aux hommes et qui représentent plusieurs femmes sous un jour très peu valorisant est peut-être (je dis bien peut-être) misogyne. J’ai le droit d’en faire l’hypothèse donc ?

On peut appeler ça de l’androcentrisme (ou du phallocentrisme aussi) si l’on veut, mais à mon avis dans tout androcentrisme il y a un fond de misogynie. Si on ne s’intéresse pas aux femmes, c’est parce qu’on ne les trouve pas intéressantes, pas dignes d’intérêt, parce qu’on a pas envie de s’intéresser à leur point de vue, non ?

Après rien de plus « normal » là-dedans il me semble. Notre société patriarcale éduque les hommes à mépriser les femmes (et éduque aussi les femmes à se mépriser elles-mêmes d’ailleurs), donc si Kubrick était misogyne, ce ne serait pas bien étonnant, ce serait plutôt l’inverse qui le serait à mon avis. C’est pour ça que l’hypothèse « Kubrick est peut-être misogyne » me semble même presque un peu plus probante que « Kubrick n’est pas misogyne », qui est apparemment plus votre hypothèse. N’hésitez pas à l’étayer un peu plus précisément d’ailleurs cette hypothèse, parce qu’elle ne va pas plus de soi que la mienne.

« Diriez vous que le cinéma de Boorman est misogyne lui aussi ? Pensez à tous ses premiers films, Delivrance ou Duel dans le pacifique, pas de femme. Dans Excalibur, la femme c’est la vilaine sorcière ou la manipulatrice adultère… Alors ? Lui aussi ? »

Pourquoi pas ? On a le droit d’en faire l’hypothèse ou pas ?

« Dr Folamour c’est sur l’excès de testostérone et les fluides corporels qui irradient la masculinité d’une poignée de mecs qui ont le pouvoir et que le pouvoir rend fou… Le film serait misogyne parce que la secrétaire ne se révolte pas ?
Peut être que si les femmes dans Dr Folamour ne se révoltent pas, c’est qu’elle font parties d’un monde que Kubrick critique ? Non ? Montrer une femme qui ne serait pas féministe dans un film serait forcément un acte misogyne ? »

J’ai pas dit que Dr Folamour était misogyne, j’ai dit que « la misogynie n’y est pas trop sensible » (parce que je faisais l’hypothèse que Kubrick était peut-être misogyne). J’ai l’impression que Dr Folamour reste ambivalent sur cette question. C’est pour ça que je disais que ça me gênait un peu, cette absence totale de point de vue féminin. Parce que si le film laisse la lecture aussi ouverte à ce sujet, tout le monde peut y trouver facilement son compte (dont les misogynes). Or nous vivons encore une fois dans une société patriarcale qui encourage à mon avis la misogynie de manière structurelle. Ne rien n’y opposer ne revient pas à proprement parler à être misogyne, mais ça permet à ceux qui le sont de le rester sans rien y opposer, c’est tout. Encore une fois, ça me gêne déjà moins que la misogynie crasse, c’est entre autre pour ça que c’est un des Kubrick que je préfère.

Bon, je m’arrête parce que j’ai déjà écrit un trop long pavé. Si vous voulez, on peut éventuellement parler plus précisément d’un de ses films, pour éviter de rester dans l’hypothèse trop vague. Par exemple Orange Mécanique, puisque l’exemple de la femme à chat vous a semblé insuffisant. Ça évitera peut-être aussi qu’on passe notre temps à s’envoyer des piques, ce qui n’est pas très constructif, je vous l’accorde… Donc si ça vous dit, je reregarde Orange Mécanique pour me rafraichir la mémoire, et on en parle (par contre je ne garantis pas d’avoir le temps très vite, ptet dans une semaine environ). Ok ? (après dites moi si vous voulez parler d’autre chose ou ne pas discuter avec nous sur ce site, pas de problème).

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