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#37658
Milu
Invité

Ce que je veux dire c’est que le racisme ne se limite pas à des skinheads jetant un arabe dans la seine ou à des membres du ku-klu-klan lynchant un noir. Les gens dits ordinaires peuvent aussi agir dans ce sens avec des gestes des paroles en apparences anodines.

« les gens ordinaires ». « en apparences ». C’est-à-dire? Les apparences selon le jugement de qui? ordinaires au regard de quelle norme?

En fait on ne se comprend pas. Je suis parfaitement consciente que le racisme ne se limite pas aux fafs ou au KKK. S’il te plaît, on peut dépasser cette grandiose découverte et creuser un peu? la norme c’est la personne blanche, si tu continues à te référer implicitement, sans l’assumer, à cette norme, tu contribues à un mécanisme fondamental du racisme qui est de renforcer le statut des personnes non-blanches comme « autres », « racisées », « spécifiques » — et du coup les personnes blanches comme neutres, normales, non-spécifiques, sans signe distinctif.

or comme dit Stella Magliani-Belkacem, les blanc-hes sont tout autant racisé-es que les noir-es, les arabes etc. C’est un effet pervers de cette appellation pourtant très répandue dans les discours antiracistes que de perpétuer l’idée que le racisme construit de l’altérité, sans toucher à la « blanchité » des blanc-hes, c’est-à-dire au fait que le racisme construit simultanément des identités « autres » et une identité présumée centrale, neutre, universelle, sauf que les blanc-hes s’épargnent cette prise de conscience par le fait que le discours blanc est hégémonique.

http://www.etatdexception.net/la-fragilite-blanche-pourquoi-est-ce-si-dur-de-parler-aux-blancs-de-racisme/

Ou pour tenter de paraphraser Edward Said, lorsque les occidentaux (écrivains et colons) ont construit « l’Orient », iels ont simultanément, implicitement, construit « l’Occident ». Le racisme crée une norme, la blanchité, et réfère les non-blanc-hes à cette norme pour expliquer leurs particularités. Christine Delphy explique dans « Classer, Dominer » que distinguer c’est toujours déjà hiérarchiser. Il n’y a pas de discours « différentialiste » qui ne soit en même temps hiérarchisant.

La neutralité revendiquée des blanc-hes lorsqu’iels parlent de race est en fait un point de vue situé qui refuse de se voir comme tel, qui se prétend universel, normal, allant de soi.

Un autre souci pour moi c’est l’absence totale de matérialisme historique de ton analyse.

Pour idéologie/système je me base sur le colonialisme. Tout d’abord on a établi que le blanc était intelligent et cultivé contrairement au noir stupide et ignare.

« on » c’est qui?

Une fois cette théorie établit à coup d’arguments pseudo-scientifique, les occidentaux sont allés apporter les biens faits de la civilisation aux noirs en leur dérobant leurs terres, leurs biens, et leurs libertés.

donc il n’existait aucune « théorie » de la supériorité raciale des arabes, des noirs, des asiatiques? les blancs/occidentaux seraient les seuls à avoir développé leur discours raciste tranquillou et une fois qu’il était au point ils se sont servi de cette puissance de feu rhétorique pour décimer et exploiter les autres peuples qui, étourdiment, n’avaient pas du tout prévu de contre-argumentaire?

On peut aussi en revenir au nazisme. D’abord on a établit à quel point les juifs étaient nuisibles, et ensuite mis en place un système d’oppression, puis d’extermination.

Ha, alors un système d’oppression s’est mis en place (tout seul?)… quand ça au juste? Et « on » (donc pas le même « on », ou alors les ancêtres du « on » de la phrase d’après??) a fondé l’antisémitisme, du coup… quand? je ne t’apprend pas que l’antisémitisme n’a pas été inventé par les nazis, et que l’oppression des juifs en Europe est très ancienne (https://fr.wikipedia.org/wiki/Antis%C3%A9mitisme#Histoire).

Mais tu as l’air de t’y connaître pas mal, n’hésite pas à citer des sources pour qu’on puisse s’instruire davantage.

Quoi qu’il en soit il manque donc un petit élément de contexte à ton panorama historique: les conditions matérielles, qui ont permis aux puissances occidentales d’asservir économiquement et politiquement une large partie de la population mondiale. Le fait que certains discours racistes préexistent à la colonisation (oui, ok, Aristote pour l’exemple classique) n’explique en rien la colonisation. En tout cas c’est une explication a posteriori, donc ad hoc. Ce n’est pas une analyse historique, juste une constatation de certaines concordances plus ou moins fortuites. Le biais de l’observation est patent: si nous vivions dans un monde parallèle où la colonisation n’avait pas eu lieu, le racisme d’Aristote seraient une simple curiosité du personnage ou de son époque. (Aristote a écrit beaucoup de conneries, et même s’il a effectivement été très influent, démonter ses erreurs était un passe temps répandu dans les universités européennes au Moyen Age)

Pour une description détaillée de comment les discours racistes ont accompagné (et non précédé) la colonisation, ont évolués en fonction de logiques certes complexes mais toujours conditionnées par le rapport de force géopolitique, je te conseille la lecture de « La République Raciste » de Carole Reynaud Paligot.

Comme je suis blanche, je précise que tout ce que je crois comprendre du racisme provient de lectures et de discussions avec des personnes qui subissent cette oppression; mais j’en fais un condensé personnel donc n’hésitez pas à venir me demander des comptes si vous voyez des trucs problématiques dans mes propos.

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