Louie est une série télévisée créée en 2010, dirigée et interprétée par Louis C.K. La série est basée sur la vie de comédien de stand-up et de père divorcé de Louis C.K, d’une manière romancée et humoristique. Elle est ponctuée d’extraits de ses propres spectacles.
Les thèmes abordés sont ainsi l’humour, la paternité, le divorce et aussi le couple et le rapport de Louie aux femmes. Si la série a été encensée par la critique, le traitement de son thème me paraît très problématique au cours de la première saison, qui m’a fortement déplue.
Louie a 40 ans, deux filles, il vit mal son divorce, son célibat et n’est pas doué avec les femmes. Dans l’épisode pilote on nous montre ainsi un rendez-vous amoureux où Louie enchaîne les gaffes, les phrases maladroites puis tente d’embrasser la femme alors que manifestement elle passe un très mauvais moment. Le personnage nous est aussi présenté comme quelqu’un de laid, gros, qui ne prend pas soin de lui, etc. Nous sommes ainsi amenés à trouver Louie pathétique tout en éprouvant de l’empathie et de la pitié pour lui avec tout ce qui lui arrive de négatif au cours de la saison. Celle-ci est assez noire, les moments heureux/joyeux sont pratiquement inexistants, l’humour des spectacles présentés est amer, les personnages antipathiques pour beaucoup, et notamment les femmes.
Des harpies sexistes anti-hommes
Les personnages féminins sont pratiquement tous détestables, et la série est parfois très clairement misogyne. Si le premier rendez-vous amoureux est un échec à cause de l’attitude maladroite de Louie, il en est autrement pour les deux autres.
Lors du deuxième rendez-vous, Louie est menacé d’être « tabassé » par un adolescent. Il résout la situation calmement par le dialogue et l’adolescent et ses amis finissent par partir. Entre temps l’attitude de la femme a changé, elle est devenue très froide. Elle finit par expliquer que l’attitude de Louie et son refus d’en venir aux mains est un « tue-l’amour », que ce n’est pas viril, qu’elle reconnaît que sa réaction est « primaire », animale mais qu’elle n’y peut rien. Comme si l’injonction sociale à la virilité pour les hommes venait des femmes, séduites par les « mâles alpha », les hommes violents. On retrouve cette idée dans le discours donné aux femmes battues, qui seraient séduites par ce type d’hommes violents. Louie se moque ensuite de cette femme, par exemple en lui tenant la porte, comme si la galanterie était là encore une demande des femmes, à laquelle les hommes aimeraient échapper. Cette idée que le sexisme touche principalement les hommes (le sexisme envers les femmes n’est jamais traité dans la série) et qu’il vient des femmes revient une autre fois lors du troisième rendez-vous amoureux de Louie. A la fin de la soirée qui semble s’être passée merveilleusement, la femme lui annonce timidement qu’elle a déjà un enfant en espérant que ça ne changera rien pour lui. Louie annonce n’avoir aucun souci avec ça d’autant qu’il est père lui aussi. Mais là d’un coup, la femme se ferme et déclare que c’est un « tue-l’amour » et qu’elle ne souhaite pas revoir Louie. Un homme qui élève ses enfants, ce n’est pas séduisant…
Dans l’univers de Louie, si les femmes sont cantonnées à s’occuper des enfants et que les hommes sont violents, c’est parce que ces schémas sont sollicités par les femmes, qui ne peuvent pas être séduites hors du cadre hétéro-normatif classique, où chacun se comporte selon un rôle genré, là où l’homme aimerait s’émanciper et se comporter naturellement. Ce traitement des relations hommes-femmes, en plus d’être sexiste, me paraît tout à fait anti-féministe.
Tu n’es pas prêt à te battre avec un gamin pour défendre ta dignité ? Moi qui pensais être en compagnie d’un homme un vrai !
Une galerie misogyne de personnages féminins
Mais ce n’est pas seulement dans ces scènes de rendez-vous que l’on est invité à compatir avec Louie lorsqu’il est avec des femmes.
Il y a par exemple le personnage de la belle femme usant de ses charmes pour manipuler les hommes. Louie va chercher un chien pour ses filles dans un refuge et une femme utilise la séduction pour l’arnaquer et le pousser à acheter un chien mourant. Le chien décédera en effet quelques minutes après que Louie l’ait ramené chez lui.
Il rencontre aussi plusieurs femmes « hystériques », ou présentées comme « folles ».
Une vieille femme exhibitionniste dans le premier épisode essaye d’attirer son attention dans un immeuble pendant qu’il attend la femme du premier rendez-vous. L’attitude de la vieille femme est prétexte à rire et Louie en essayant de se dérober, presse son amie en martelant à sa porte. Le spectateur doit se sentir mal pour Louie, coincé entre l’exhibitionniste et son amie furieuse de l’impatience de Louie. A noter que l’exhibitionnisme est en grande majorité le fait d’hommes, la série en faisant ici une pratique féminine. Elle présente ainsi une agression sexuelle d’une femme sur un homme, ce qui tend à nier le rapport de domination des hommes sur les femmes. Le dialogue qu’elle a avec Louie, en l’insultant et en prétendant que c’est lui qui veut la voir, peut être vue comme une dénonciation des normes sociales concernant les femmes. Cependant comme elle paraît « dérangée », que Louie ne veut pas la voir, et subit cette situation et ce dialogue, il y a là peut-être au contraire une inversion des rôles, avec la femme qui devient responsable de l’injonction sociale à montrer son corps, et non pas Louie et peut-être les hommes en général. La scène est humoristique et Louie ne semble pas affecté par la situation, ce qui rend l’agression un peu bizarre mais sans gravité. Lorsque l’on connait la peur et la souffrance que peuvent vivre des femmes confrontées à un homme exhibitionniste, ce traitement léger peut paraître offensant.
Dans le dernier épisode de la saison, on voit la baby-sitter des filles de Louie qui lui explique en pleurant – la situation est présentée comme absurde et humoristique – qu’il est très important qu’il trouve une compagne, parce qu’il est déprimé et que ce sera mieux pour ses filles s’il a quelqu’un. Il semble qu’elle reporte sa propre solitude sur Louie, et ces sanglots exagérés le placent dans une situation de mal-être dont on est supposés rire. Si on sent que c’est sans doute elle qui est dans cette recherche du couple et qu’elle ne s’intéresse pas vraiment au statut marital de Louie, l’injonction sociale est malgré tout destinée à Louie dans la scène et elle se console quand Louie s’exécute. La baby-sitter le pousse à sortir pour la soirée, lui demande de rencontrer quelqu’un en déclarant qu’il doit « être un tout » et ne pas être un « loser ». Nous avons là encore les hommes victimes d’une pression sociale de la part des femmes, une pression qui est habituellement subies par ces dernières : elles auraient besoin d’un homme pour s’accomplir en tant que femmes.
En outre, Louie est en effet complexé par son célibat dans la série et son discours s’accorde dans la suite de l’épisode avec celui de la baby-sitter, par exemple dans la scène où on le voit contempler tristement des couples dans la rue. Comme pour l’injonction sociale à la virilité, Louie la rejettera ensuite en partie en passant les dernières minutes de ce dernier épisode avec ses filles. Oui, c’est terrible d’être seul dans Louie, mais le personnage peut essayer de sortir de ce schéma et d’obtenir de l’affection par le biais de ses filles plutôt que d’une femme. Ce n’est peut-être pas un hasard si Louie ne rejette ce discours qu’une fois que la série l’ait mis dans la bouche d’une femme.
Un père célibataire = un loser dépressif, nous dit une femme
Il y aussi la mère de Louie, personnage détestable qui refuse de dire « je t’aime » à son fils (le frère de Louie), et se comporte de manière très « égoïste » car elle est venue rendre visite à Louie seulement pour lui annoncer qu’elle était lesbienne. On retrouve l’idée selon laquelle les femmes ont besoin du couple traditionnel, car nous voyons la mère plus jeune dans un autre épisode de la série et elle est alors un des rares personnages féminins positifs. Elle explique dans cet épisode à Louie qu’il peut choisir la religion de son choix, ou choisir de ne pas croire, comme elle. Quand on la revoit, elle est métamorphosée, cruelle et parfois « hystérique » (durant une longue scène de sanglots factices), le père de Louie est mort et elle s’est remariée avec une femme. La série montre ainsi deux versions du personnage : la mère hétéro intelligente, aimante et compréhensive avec son fils, et la mère lesbienne désagréable, égoïste… La corrélation n’est pas soulignée dans la série elle-même, aussi je peux me tromper dans mon interprétation mais ce choix me parait maladroit en tous les cas.
L’homosexualité et les privilèges de l’homme hétéro
Une autre scène présente un personnage homosexuel, Rick, jouant au poker avec Louie et d’autres hommes. Ses amis lui posent tout un tas de questions sur sa vie sexuelle et malgré leur voyeurisme, se montrent dégoûtés, ne « veulent pas entendre ça », « ont envie de vomir » quand Rick leur répond. Les autres sont plus « tolérants » mais tous, dont Louie, trouvent à l’homosexualité de leur ami un aspect dérangeant et le voient en tout cas comme une particularité là où leur comportement est normal. Rick a cependant quelques phrases très intéressantes, sur l’hétéro-normativité même s’il ne la nomme pas (« je parle beaucoup plus de ma sexualité avec vous qu’avec mes amis gays », « non [je ne suis pas dégoûté par les femmes], je n’y pense pas, je n’en ai rien à faire de ce que vous faites, c’est vous qui voulez savoir pour moi »)[1], et explique l’origine du mot « faggot »[2]et pourquoi il faut être conscients du sens des insultes quand on les utilise. Cette réflexion intéressante est malheureusement en partie déconstruite, immédiatement après. L’un des amis de Rick et Louie répond en appelant Rick « faggot » à nouveau et ce dernier éclate de rire et l’embrasse sur le front, ce qui met fin à la scène. ‘Manquerait plus qu’on nous explique qu’utiliser des mots offensants, ça offense des gens. Ce comportement n’est cependant pas étonnant, beaucoup de gens dans les catégories dominées rient des blagues qui les visent avec les membres des catégories dominantes afin d’être acceptés, de ne pas passer pour « rabats-joie ». L’explication n’est malheureusement pas donnée dans la série ce qui donne une scène qui me semble très ambiguë.
Des insultes, des questions indiscrètes et des jugements sur l’homosexualité → un bon moment entre potes.
Louie contre les femmes
Le traitement des femmes par la série permet de justifier des comportements misogynes de la part de Louie : le mépris qu’il a envers la femme du second rendez-vous, et aussi les blagues sur le viol et l’utilisation du mot « cunt »[3] à l’adresse d’une femme qui parle pendant son spectacle. La femme lui déclare qu’il est « offensant », et Louie demande « ah bon, vous n’aimez pas les blagues sur le viol ? ». Ce n’est d’ailleurs pas Louie qui est présenté comme une mauvaise personne dans cette scène, la femme est finalement prise de cours dans son argumentaire et part « perdante » tandis que des amis comédiens de Louie (tous des hommes) approuvent son comportement.
La scène d’après générique revient sur ce dialogue en nous montrant les deux acteurs en train de rire ensemble pendant le tournage, ce qui à mon avis est un moyen de masquer le côté très problématique de la scène et l’humiliation de cette femme. En effet, c’est un procédé qui est utilisé plusieurs fois au cours de la saison, je vais y revenir. On note en outre que ce moment de complicité entre acteurs ne se produit pas avec la scène de la femme qui le rejette pour son absence de « virilité » ou celle qui le rejette pour sa paternité, dans ces deux cas ce qui arrive à Louie est très sérieux, on ne va pas plaisanter avec ça.
La violence contre les hommes, ou un masculinisme ordinaire
Pour revenir sur les « blagues sur le viol », Louie est d’ailleurs violé dans l’un des épisodes par son dentiste, mais la série ne revient jamais là dessus. Cette scène est amenée comme un moment très humoristique : Louie a été anesthésié et fait plusieurs rêves, le dernier mettant en scène le dentiste fourrant une banane dans sa bouche. Alors que Louie s’étouffe et donc se réveille, on voit le dentiste refermer rapidement sa braguette et faire semblant de ne pas comprendre son trouble.
La scène se termine là, et si ce n’est pas dit dans la série, on a l’impression que Louie a sans doute compris ce qui lui était arrivé : il soupçonne que quelque chose en rapport avec son rêve s’est passé, il sait qu’il a eu quelque chose dans la bouche, on a du mal à imaginer qu’il puisse soupçonner autre chose. Ce viol ne sera plus évoqué par la suite dans la saison. J’ai l’impression qu’on a là une légitimation des blagues sur le viol racontées par Louie précédemment. Il a le droit d’aimer les blagues sur le viol et de s’étonner qu’une femme ne soit pas de son avis car en tant qu’homme il peut tout autant être violé et le sera. Cette idée que les hommes sont autant violés que les femmes[4] est peut-être présente dans cette scène, car cela prolonge un thème déjà soulevé avec la femme exhibitionniste du renversement des rôles genrés dans les violences sexuelles.
Enfin ce n’est pas un sujet très important, Louie a dû deviner ce qui s’était passé chez le dentiste mais n’en souffre pas, n’en parle pas. J’ai l’impression que la scène est rapidement interrompue pour que sa fonction reste uniquement humoristique, que cela reste « une des blagues » de l’épisode parmi d’autres.
Petite blague sur le viol de Louie qui vient de se produire, le spectateur et le dentiste complices de la scène rigolent de l’incompréhension de Louie.
La solidarité et l’amitié entre hommes blancs hétérosexuels
Ce traitement des femmes permet également de justifier des moments de solidarité avec d’autres hommes qui s’entendent sur leur nature d’hommes opprimés : on voit ainsi les parents du gamin qui veut tabasser Louie dans l’épisode du deuxième rendez-vous amoureux. Louie se dispute avec eux, le père frappe son fils et la mère insulte copieusement Louie en hurlant (encore un personnage d’hystérique). Le père malgré le coup à son fils paraît comme plus posé, et revient ensuite vers Louie, s’assoit avec lui sur le perron pour discuter. On apprend que cet homme souffre de son comportement violent et ne comprend pas pourquoi son fils lui donne tant de mal alors qu’il essaye de bien faire les choses. Mais vous comprenez il a trois enfants c’est difficile à gérer. Louie compatit, les deux hommes ont l’air malheureux. Le spectateur est ainsi invité à prendre en pitié cet homme violent, tandis que la femme (qui pourrait très bien être battue par son mari elle aussi pour ce qu’on en sait) nous a été présentée comme une personne affreuse. Prendre le point de vue du père permet aussi d’éviter de penser à la situation du fils en retournant le problème : le fils est violent donc le père doit répondre par la violence, plutôt que l’inverse, que soulevait alors Louie quand il était dans la maison avec toute la famille. La violence faite aux enfants perd également de son importance puisqu’on compatit avec la souffrance et la faiblesse du père, et que de l’adolescent on garde l’image de l’agresseur de Louie.
J’ai également l’impression qu’on retrouve souvent ce personnage de père avec une famille anxiogène à laquelle il est extérieur, tandis que les autres forment un bloc, comme s’il était le seul sujet, la seule personne. La série persiste ainsi à ne nous montrer que le point de vue des hommes, leur souffrance, leurs problèmes existentiels, tandis que les femmes et les enfants, en plus de n’être jamais traités comme points de vue, sont à peine des personnages : la séductrice, la femme en colère, la folle, le rendez-vous de Louie, la « petite frappe »… Même les filles de Louie n’ont aucune personnalité, identité, on peine à se rappeler de leurs prénoms tout au long de la saison alors que Louie se définit énormément par sa paternité.
On partage une cigarette entre hommes en racontant nos vies compliquées d’hétéros blancs.
On note un autre moment de complicité et solidarité avec un homme dans un épisode où Louie prend l’avion. L’homme obèse qui s’installe à côté de lui nous est d’abord présenté comme une gêne pour Louie, avant de devenir un ami quand l’avion manque de s’écraser et qu’ils doivent vivre ce moment difficile ensemble. Ce retournement de situation, de l’homme qui passe de gêne à ami, se reproduit également dans l’épisode où il s’énerve contre son voisin de palier pour finalement passer l’après-midi avec lui. La complicité masculine se retrouve aussi dans la scène du poker, la discussion avec la femme qui interrompt le spectacle (les groupes d’amis de Louie étant d’ailleurs non mixtes), etc.
Les rapports aux hommes sont donc vraiment différents des rapports aux femmes dans la série.
Même le lien de Louie avec son ami médecin, qui l’humilie, ou lui fait croire qu’il a une maladie mortelle à chaque rendez-vous, n’est pas traité de la même manière. Louie ne s’énerve jamais vraiment et continue à le consulter, à être son ami.
Le harceleur sexuel : un dragueur maladroit sur lequel s’apitoyer
Un épisode particulièrement dérangeant met en scène un harcèlement que Louie fait subir à une femme noire. Malgré de nombreuses remarques et tentatives de se sortir de cette situation de la part de la femme, Louie persiste à engager la conversation, lui offre des fleurs et insiste lourdement quand elle refuse ce qui finit par nécessiter l’intervention d’un autre homme, la suit à la sortie de son travail, force le passage pour continuer à la suivre dans le métro, et ce jusqu’à arriver sur le pas de sa maison : du coup Louie connait son adresse, mais la femme ne pense jamais à appeler la police, et reste très détendue pendant toute la scène : tout ceci se passe sans que cette situation ne soit clairement montrée comme ce qu’elle est, à savoir un harcèlement sexuel. Au pire Louie apparaît comme un dragueur relou, ou pas très doué.
On rajoute à cela des remarques racistes tout le long, Louie veut en fait coucher avec une femme noire pour « voir ce que ça fait ». Les personnes noires sont d’ailleurs interchangeables car à la fin de l’épisode Louie obtient quand même ce qu’il veut car, même si la première réussit à se dérober une fois arrivée chez elle, une autre femme noire veut coucher avec lui. Je ne peux pas le voir différemment que comme une légitimation de son comportement tout le long de l’épisode, où Louie était très malheureux de pas avoir sa « récompense » et puis finalement si, c’est pas la même mais c’est bien pareil, une femme noire. J’ai l’impression que la scène de sexe qui suit veut nous donner l’image d’une femme bestiale et dominatrice (elle est au-dessus, Louie ne bouge pas, et elle hurle), ce qui me paraît raciste encore une fois, car en plus de s’appuyer sur des stéréotypes plus que douteux, cela permet de bien insister sur la légitimité de ce « fantasme » de la part de Louie, parce que les femmes noires, par leur bestialité, n’ont pas du tout la même sexualité que les blanches.
On note le moment de rigolade au générique entre la femme harcelée et le harceleur (enfin du moins les deux acteurs), tout ceci était très bon enfant, regardez on est tout content, y avait aucun problème.
Le monsieur te dit de les prendre, alors embête pas le monde et prends les.
Les noirs interchangeables est en outre une thématique de retour dans le dernier épisode de la saison (où l’on va à nouveau être triste car notre pauvre Louie n’arrive pas à coucher avec des femmes de 20 ans en leur sautant presque dessus). Les deux personnages avec qui Louie sort en boîte sont noirs et apparemment fabriqués en série. On y apprend ainsi, par un groupe d’hommes blancs jaloux, que les noirs, en plus de courir vite et de savoir danser, sont de super dragueurs (tous) et que c’est vraiment trop facile pour eux de séduire des femmes. Là encore, pauvres hommes blancs désavantagés par cette concurrence presque déloyale. D’ailleurs les noirs ont vraiment beaucoup de privilèges décidément car ils n’ont pas besoin de faire la queue pour entrer en boîte et peuvent ainsi faire passer Louie, qui sans eux aurait dû attendre avec les autres blancs opprimés. Enfin les deux personnages ont la même taille, le même gabarit, la même tenue, la même coiffure, et pas de noms, ce qui renforce encore ce côté « les noirs sont tous pareils et différents des blancs ».
Être un père blanc hétéro masculiniste
Étant donné la rareté des moments vraiment drôles, l’absence de moments touchants, ou bien gâchés par le nauséabond du message de la série par ailleurs, ça m’a été très difficile d’apprécier. Il y a quelques moments intéressants : l’explication du mot « faggot », l’amie de Louie, Pamela, dont je n’ai pas parlé mais qui est le deuxième personnage féminin positif avec la mère jeune et éventuellement les filles de Louie (mais comme je l’avais dit, malgré le rôle de père de Louie qui est présenté comme central à son personnage, on ne les voit pratiquement pas). Le reste est quant à lui sexiste, raciste, homophobe…
Non je n’ai pas vraiment compati aux malheurs de ce père blanc hétéro qui n’arrive pas à avoir une petite copine jeune et magnifique en claquant des doigts et qui ne semble pas avoir d’autres ambitions dans la vie. Le couple comme idéal, comme unique et ultime objectif de vie est d’ailleurs martelé à plusieurs reprises, même s’il est finalement questionné à la fin de la saison, toujours dans l’idée de l’homme blanc opprimé mais s’émancipant.
On note aussi cette règle de la femme jeune et belle (par belle j’entends bien sûr conforme aux canons de beauté actuels) qui peut être avec un homme laid (Louie étant déclaré « laid » par la série à plusieurs reprises) alors qu’il n’est pas envisageable pour la femme d’être plus laide ou plus vieille que son ou sa partenaire. L’épouse de la mère de Louie par exemple est jeune et belle et on doit apparemment en être très choqués. Par ailleurs, si Louie couche occasionnellement avec des femmes non conformes aux canons, c’est sujet à rire, et il n’a de rendez-vous amoureux qu’avec des femmes très belles.
Beaucoup d’aspects de ce personnage, son sexisme, ses rapports aux femmes, les problèmes qu’il rencontre à être un homme blanc hétéro et le déni d’une existence propre aux femmes, me font énormément penser au personnage de Poire (ce que les anglophones appellent « nice guy » en rapport à la « friend zone »), développé par Lauren Plume sur son site :
http://lesquestionscomposent.fr/poire-le-nice-guy-portrait-robot/
http://lesquestionscomposent.fr/poire-aime-les-femmes/
Je serais intéressée par d’autres avis sur la série sur les points que j’ai soulevés. Je suis aussi curieuse de savoir si la série évolue au cours des saisons comme je n’ai visionné que la première, n’hésitez donc pas à donner votre avis !
Marie E.
[1] Traductions faites à partir des dialogues en anglais.
[2] Insulte désignant une personne homosexuelle qui ferait référence au matériau utilisé pour brûler des gens sur le bûcher (explication choisie par la série) ou à de vieilles femmes portant du bois (l’origine reste apparemment obscure).
[3] Insulte sexiste désignant les organes génitaux féminins (similaire à « con »/ « conne » dans l’origine étymologique).
[4] Ce qui ne veut pas dire que les hommes ne sont pas aussi victimes de viol bien entendu, même si ce n’est pas dans les mêmes proportions que les femmes. Le traitement du viol masculin ou du viol en général est de toute manière révoltant ici, la souffrance des victimes comme la gravité du crime étant niées.
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