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Geeks à l’écran (III) : hacker les codes genrés de l’informatique

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Peu diversifié dans la réalité, le monde des informaticiens est donc également très masculinisé, blanc et hétérosexuel dans ses représentations (cf les première et deuxième parties de cet article).

 geeks-3-2The Social Network

 geeks-3-3Silicon Valley

 geeks-3-4Cyprien

L’antre des informaticiens, toujours le même : des ordinateurs et des hommes.

 

Etant donnée les stéréotypes liés aux geeks informaticiens, il est d’autant plus difficile pour une femme de se projeter dans ces activités. Selon les normes genrées rabâchées par la société et notre éducation, un informaticien est peu émotif, alors qu’une femme l’est par nature. L’informaticien est célibataire, alors que l’objectif principal d’une femme dans sa vie est de trouver l’amour, se marier et fonder une famille. Le geek est réputé laid ; or la femme généralement objectifiée n’existe que par sa beauté et sa jeunesse. L’informaticien est ultra-intelligent, rationnel et peu sportif, mais l’important chez une femme est son physique et ses intuitions, pas son cerveau.

Les (non-)relations stéréotypées entre hommes informaticiens et femmes oscillent entre deux pôles. Les femmes sont perçues comme des êtres difficilement accessibles qui peuvent faire peur aux geeks informaticiens mais qui n’en demeurent pas moins l’objet de tous leurs fantasmes. Le rêve de certains d’entre eux peut être de rencontrer une femme geek qui partage les mêmes passions qu’eux. Le monde « geek » et sa culture sont montrées comme étant profondément misogynes. Typiquement dans la série Silicon Valley, les geeks ne connaissent que les strip-teaseuses, portent des T-shirts « H.T.M.L – How To Meet Ladies », codent des programmes sexistes tels que NipAlert[1] et multiplient les insultes sexistes et homophobes ainsi que les références pornographiques.

Le trope du geek autiste surdoué au cerveau hypermasculin

Etre hacker ou développeur au cinéma est très souvent synonyme d’être surdoué ainsi que d’être peu sociable, puisque l’intelligence mathématique et logique est largement valorisée par rapport à l’intelligence dite émotionnelle. Les femmes surdouées et/ou peu sociables comme le Dr Brennan dans la série Bones sont assez rares à l’écran, puisque les femmes ne sont pas censées briller par leurs capacités de raisonnement mais par leurs qualités à prendre soin des autres et à tisser des relations. En fait, la représentation des femmes et des informaticiens en général rencontre souvent un trope bien particulier : celui du geek informaticien autiste. Des personnalités comme Bill Gates et Mark Zuckerberg ont ainsi été « diagnostiquées » comme souffrant du syndrome d’Asperger, respectivement en 1994 dans un portrait publié dans le Times intitulé « Diagnosing Bill Gates » et en 2010 dans des critiques qui suivirent la sortie du film The Social Network. Jordynn Jack analyse en détail les discours autour de l’autisme et de la figure du geek dans l’un des chapitres de son livre Autism and Gender.

Selon elle, la figure du geek autiste émerge dans un contexte économique où les compétences traditionnellement associées aux geeks (la programmation, la catégorisation, la systémisation) sont montrées comme les clés du succès financier. En même temps, des compétences étiquetées « féminines » et dont les personnes autistes sont censées être dépourvues, comme les qualités relationnelles et l’intelligence émotionnelle, sont mises en valeur.

« Cette tension émerge de la contradiction entre l’économie du savoir et l’économie de service : les geeks informaticiens sont posés comme les champions du succès financier qui peut être atteint dans le premier type d’économie, mais les compétences féminisées comme l’intelligence émotionnelle sont célébrées comme étant les clés du succès dans le deuxième type. Ce qui est crucial est que la masculinité hégémonique traditionnelle est marginalisée dans les deux. Ceux qui réussissent dans l’économie du savoir sont les geeks, et pour protéger la figure du male traditionnel (maintenant diminué dans sa productivité économique), ces geeks sont rejetés de manière répétée comme des handicapés, des autistes, des anormaux. »[2]

Dans un article intitulé « The Geek Syndrome »[3] publié en 2002 dans le magazine Wired, Steve Silberman parlait de l’accroissement « inquiétant » du nombre de personnes atteintes du syndrome d’Asperger dans la Silicon Valley, résultant de la concentration géographique des geeks qui se reproduisent plus facilement entre elleux. Le psychologue Simon Baron-Cohen présentait quand à lui en 1997 sa théorie sur l’autisme basée sur le « cerveau hyper-masculin ». Les femmes auraient des cerveaux plus enclins à l’empathisation (valoriser les interactions sociales, prendre soin des autres et changer les couches des bébés) tandis que les hommes auraient des cerveaux plus enclins à la systémisation (comprendre les systèmes, organiser l’information, faire des classifications et jouer au foot). Les personnes autistes ou ayant le syndrome d’Asperger auraient une version extrême de ce cerveau « masculin », qui aurait bien du mal avec les relations sociales et à faire preuve d’empathie. De là à faire le lien avec le stéréotype du geek informaticien bon en mathématiques et en logique, à l’aise avec les machines mais complètement démuni en société et pour effectuer des tâches courantes de la vie quotidienne, le pas a été allègrement sauté.

Or, comme Jordynn Jack le rappelle :

« Alors que l’activité de systémisation et le manque d’empathie reçoivent une grande attention dans la théorie EMB [cerveau hyper masculin], d’autres caractéristiques traditionnellement liées à l’autisme, comme le comportement répétitif et les retards dans le développement du langage, n’en reçoivent aucune. Comme je l’ai montré, les sortes d’intérêts restreints mentionnés dans la théorie du cerveau hyper masculin sont le plus souvent des intérêts traditionnellement associés aux hommes. Alors qu’il n’y a rien dans la description clinique de l’autisme qui requière que ces intérêts soient dans les domaines spécifiques des sciences, des maths et de la technologie, dans la théorie EMB les intérêts féminisés sont exclus. En conséquence, les femmes ont été marginalisées dans les recherches sur l’autisme, particulièrement dans les recherches neuroscientifiques. De plus, les geeks masculins et les nerds, comme Zuckerberg dans The Social Network, sont devenus des personnages types à la télévision, dans la littérature et dans les films ; le plus souvent, les personnages créent eux-mêmes un trope des personnes autistes, en confondant une partie des caractéristiques de l’autisme avec la totalité. » [4]

Le personnage de Abed, dans la série Community, est relevé par plusieurs bloggers et journalistes comme étant une alternative bienvenue au personnage cliché ayant le syndrome d’Asperger : « Il est obsédé par la culture pop au lieu des maths et des sciences. Il a clairement de l’empathie et il est capable de former des relations sérieuses. Alors ce n’est pas une surprise qu’il ait été accueilli à bras ouverts par la communauté Aspie malgré son manque de diagnostic officiel. »[5]

 geeks-3-5Abed Nadir (Community)

Au contraire, parmi les personnages souvent décriés et non identifiés officiellement comme ayant le syndrome d’Asperger par les auteur-e-s des séries, figure l’un des personnages geek les plus emblématiques de ces dernières années : Sheldon Cooper dans The Big Bang Theory.

 geeks-3-6Sheldon Cooper (The Big Bang Theory)

L’article « These Are The TV Characters Gettings Asperger’s Wrong, From Someone Who Has it » (« Voici les personnages télé qui représentent mal le syndrome d’Asperger, de la part de quelqu’un qui l’a »), remet le héros à sa place de geek, et non d’autiste :

« Bien que Sheldon Cooper (Jim Parsons) soit souvent cité comme étant la quintessence du personnage télé avec le syndrome d’Asperger, ces excentricités sont trop imprévisibles pour être catégorisées avec certitude comme appartenant au spectre de l’autisme. En fait, Sheldon est, plutôt, ni plus ni moins qu’une caricature quelconque du nerd, de la même trempe que Screetch Powers ou Steve Urkel. Tous ses intérêts ésotériques et ses faux-pas relationnels peuvent être rattachés à ces archétypes. Si une personne a le moindre doute, elle peut simplement se tourner vers le co-créateur de la série Bill Prady, qui explique que « l’identifier comme Asperger crée un trop grand poids pour faire les détails correctement. »[6].

Ceci illustre bien la confusion qui existe dans les représentations de l’autisme et de la « geekitude », et les frustrations qu’elle provoque d’un côté comme de l’autre. Ceci souligne également un autre problème : l’identification des personnages autistes par des spectateurs/rices qui ne connaissent pas bien le sujet et qui peuvent facilement faire des amalgames.

N’étant pas conformes aux normes de la masculinité (et ne pouvant donc pas avoir ce fameux « cerveau hyper masculin » doué pour l’informatique), moins de femmes sont représentées en tant que geeks ; et, dans la même logique, en tant qu’autistes ou ayant le syndrome d’Asperger. Exceptions notables, Chloe O’Brian dans la série 24 et Lisbeth Salander[7] dans Millenium semblent souvent identifiées – à tort ou à raison – comme ayant le syndrome d’Asperger, ce qui a pour effet positif notable de montrer à l’écran des femmes identifiées comme étant autistes et qui sont habituellement invisibilisées. (Notons tout de même que si la santé et l’état mental de Lisbeth sont questionnés dans les romans à travers des personnages antagonistes, le livre final semble balayer la thèse de son autisme.[8])

 geeks-3-7Chloe O’Brian dans 24

 

D’un autre côté, cette barrière à l’entrée du « syndrome geek » pour les femmes peut peut-être permettre aux autres personnages féminins d’interpréter des informaticiennes qui ne sont pas soumises aux mêmes stéréotypes que leurs collègues masculins… quitte à tomber dans d’autres tropes féminins traditionnels.

Enquêtrices, hackeuses, pirates… mais pas programmeuses

Les séries de police scientifique et de sciences forensiques mettent en scène un certain nombre de femmes scientifiques bénéficient de représentations attractives. D’ailleurs, certain-e-s constatent que la présence de ces personnages à l’écran a un effet direct sur les spectatrices :

« Les narrations publiques sur une profession font une différence. Dans les candidatures pour Girls Who Code, l’aspiration professionnelle la plus citée est la science forensique. Comme Allen [une fille de 16 ans qui s’intéresse à la programmation], peu voire aucune des filles ont déjà rencontré une personne du domaine, mais toutes ont regardé Les Experts, Bones ou quelque autre série dans laquelle une nana cool avec des super cheveux dans une blouse de laboratoire utilise son savoir-faire scientifique pour résoudre un crime. Cet effet « Les Experts » ainsi nommé a été crédité pour avoir aidé à faire passer la science forensique d’une activité essentiellement masculine à une activité essentiellement féminine. » [9]

Certaines de ces héroïnes ont d’ailleurs de solides compétences en informatique : Abby Sciuto (NCIS), Angela (Bones), Penelope Garcia (Esprits Criminels) et l’enquêtrice multi-talents Kalinda Sharma (The Good Wife), souvent à la frontière entre l’informatique forensique et le piratage

On peut remarquer que dans NCIS, les compétences d’Abby en informatique sont plutôt liées à la manipulation des machines de mesures et à la recherche d’informations dans des bases de données : lorsqu’il s’agit de pirater les systèmes d’une agence gouvernementale, il lui faut généralement l’aide de Timothy McGee, l’informaticien en titre. Dans les premières saisons, celui-ci correspond d’ailleurs au stéréotype du hacker doué avec les machines mais timide avec les femmes, peu sportif, joueur de jeux vidéos et sans « vraie vie sociale » en dehors du travail : bref, l’opposé du fringuant et séducteur Tony Dinozzo, son équipier. Pour autant, Abby et Tim travaillent généralement en binôme et collaborent dans une atmosphère d’émulation où leurs compétences d’égale valeur se complètent. Le tempérament affirmé d’Abby prend souvent le dessus sur celui de Tim, plus effacé. Ainsi, leur relation ne se conforme pas au stéréotype de l’homme informaticien venant en aide à la femme perdue devant la machine.

 geeks-3-8Tim et Abby (NCIS)

 

On trouve également quelques héroïnes hackeuses célèbres, avec un premier groupe travaillant pour des organisations gouvernementales plus ou moins officielles : Chloe O’Brian (24h), Skye (Marvel’s Agents of S.H.I.E.L.D), Rachel Gibson et Carrie Bowman (Alias), Toshiko Sato (Torchwood).

Et des freelances : Trinity (trilogie Matrix), Felicity Smoak (Arrow), Lisbeth Salander (Millenium), Willow Rosenberg (Buffy Contre les Vampires, premières saisons uniquement).

S’il semble à peu près accepté de montrer à l’écran des femmes hackeuses contourner les règles établies en s’introduisant dans des systèmes informatiques ou en les piratant, elles ne sont à peu près jamais présentées comme créatrices à part entière de programmes ou de systèmes complexes tels que des robots.

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 Lisbeth Salander

geeks-3-10Trinity dans The Matrix Reloaded 

Filmer l’activité spécifique de programmation d’un logiciel (et non de hacking) en montrant le processus de développement du point de vue de la programmeuse est beaucoup plus rare chez les informaticiennes que chez leurs homologues masculins, pour ne pas dire quasiment absent. Or la programmation est considérée comme étant l’activité noble par excellence par les informaticien-nes[10] : on peut donc postuler que cette différence de représentation selon les genres peut avoir un impact sur la manière dont les spectateurs/rices se projettent dans l’informatique.

Zoe, dans la série Caprica, est une adolescente douée en intelligence artificielle qui programme son double avatar et développe un moteur de recherche très sophistiqué pour lui donner une personnalité.

geeks-3-11 Zoe Graystone (Caprica)

Si son code est une brique essentielle de la création du premier Cylon, c’est son père ingénieur Daniel Graystone qui reste l’inventeur principal de ces robots et que l’on observe travailler durant la série.

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L’ingénieur Daniel Graystone (Caprica)

Angela, dans la série Bones, développe un programme de modélisation graphique en 3D appellée l’ « Angelator ». Cependant, Angela est surtout présentée comme une artiste, et c’est la démonstration des capacités du logiciel final, et non le processus de développement qui est filmé.

geeks-3-13L’Angelator (Bones)

De même dans la saison 3, épisode 5 de la série Arrow, Felicity confectionne un « super-virus » sans qu’on la voit travailler dessus. L’épisode se concentre au contraire sur le fait que Felicity soit dévastée par la dangerosité de son programme.

Du côté des personnages masculins (et blancs) : le processus de création et de programmation du programme de Zuckerberg est l’un des sujets centraux de The Social Network. Richard Hendricks, dans la série Silicon Valley, développe, teste et fait démonstration de son algorithme révolutionnaire. Nolan Ross corrige et améliore le programme de son protégé dans la saison 4 de Revenge. Tony Stark fait les réglages de ses Iron Man à grand renfort d’écrans nouvelle génération (et de grands gestes dans le vide).

geeks-3-14Tony Stark dans Iron Man

Dans la série suédoise Äkta människor (Real Humans), les humains qui développent ou modifient le code des hubots et qui sont filmés en action sont tous des hommes (le créateur David Eischer, son fils Léo, Silas, Jonas). Plusieurs séquences sont filmées de leur point de vue pendant qu’ils déchiffrent ou écrivent du code, de manière à ce que les spectateurs/rices se mettent dans leur peau.

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Dans la saison 2, Jonas tente de finir le code pour libérer les hubots.

Le film Ex Machina, dont la sortie est prévue au printemps 2015, met également à l’écran ce mythe récurrent de l’homme donnant vie à une créature artificielle :

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« Effacer la frontière entre l’homme et la machine, c’est obscurcir la frontière entre les hommes et les dieux. »

La programmation est fantasmée comme pouvant permettre aux hommes d’atteindre un niveau supérieur de pouvoir : créer une intelligence artificielle. Car donner vie à la machine, c’est devenir Dieu. Dans la série Real Humans, les hubots sont appelés les « enfants de David », du nom de leur créateur (rappelons que les humains sont nommés les « enfants de Dieu » dans la religion chrétienne). Par ailleurs, Ex Machina reprend de manière on ne peut plus explicite les codes genrés de ce thème classique de science-fiction : la machine est féminine (seins, taille de guêpe et hanches larges), tandis que les créateurs, eux, sont des hommes.

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Les créateurs jouant à Dieu.

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La machine.

De Prométhée à Pygmalion, du Golem à Frankenstein, de l’Eve Future aux robots d’Asimov, les inventeurs de créatures artificielles sont systématiquement des hommes. Les femmes peuvent donc être programmées mais pas programmeuses. Les créatures artificielles féminisées sont souvent objets de désir pour les hommes (supposés hétérosexuels). Déjà en 1927, le savant Rotwang dans le film Metropolis de Fritz Lang crée un robot dans le but de redonner vie à Hel, la femme qu’il a aimé, puis lui fait prendre l’apparence de Maria, la meneuse d’une rébellion chez les ouvriers et les ouvrières de la ville. Le robot double de Maria, contrôlé par Rotwang qui veut se venger du dirigeant de Metropolis, séduit alors les hommes et mène la ville au chaos.

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Metropolis (1927), Fritz Lang : le savant Rotwang crée un robot dans le but de redonner vie à Hel, la femme qu’il a aimée.

Les hackeuses prises dans les filets des stéréotypes féminins

Bien que par leurs activités, les personnages de femmes hackeuses et plus généralement informaticiennes dévient de certaines normes genrées, elles ne sont pas moins sujettes que les autres à certains traitements stéréotypés. Le film Hackers (1995) présente Angelina Jolie dans le rôle d’Acid Burn (Kate Libby) une jeune femme hackeuse qui tient tête au héros du film, le célèbre hacker Zero Cool (Dade Murphy) condamné à 11 ans pour piratage. Les deux adolescents s’engagent dans un match de piratage d’égal à égal.

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Dade ‘Zero Cool’ et Kate ‘Acid Burn’ dans le film Hackers

Mais Kate est en fait le trophée de Dade si celui-ci gagne le match : elle devra lui accorder un rendez-vous, habillée en robe. Le film adopte majoritairement le point de vue de Dade qui est le personnage principal. Les plans prolongés sur le physique de l’actrice se répètent et découpent ces lèvres entre-ouvertes, sa poitrine et son entre-jambe (dans la scène du rêve érotique de Kate et la scène dans la piscine à la fin du film). Le male gaze du film est même filmé explicitement dans la scène où les quatre hackers – dont Dade – observent dans le noir Kate et son petit copain commencer à faire l’amour, avec les plans alternant entre le point de vue du groupe de garçons et celui des spectateurs en face d’eux.

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Parmi les autres personnages féminins apparaissant quelques fois à l’écran, la compagne du hacker ennemi est clairement montrée comme étant complètement larguée en informatique, et les mères des autres héros ne cherchent qu’une seule chose : empêcher leurs enfants de toucher à leur ordinateurs et de s’adonner à des activités illégales. Kate est la seule femme ayant des compétences informatiques mais elle est ramenée de manière insistante à son physique et son profil de hackeuse semble secondaire.

Dans la série 24, Chloe est pendant la majorité des saisons entièrement loyale et obéissante à Jack Bauer : on ne peut pas dire qu’elle soit un modèle d’émancipation féministe face au super-héros implacablement viril qu’est Jack lorsqu’il va sauver sa femme, sa fille, le Président et les Etats-Unis des menaces terroristes des Chinois, des Arabes, des Mexicains, des Russes et des Sangalais (un pays imaginaire d’Afrique noire parce que de toute façon personne connaît les noms des pays de ce continent).

Le personnage de Felicity Smoak, dans la série Arrow débutée en 2012, semble offrir dans un premier temps un contre-modèle intéressant : très féminine dans le sens où elle porte des boucles d’oreilles, du vernis à ongle et du maquillage, Felicity s’affirme d’abord par son intelligence hors du commun (elle est présentée comme étant surdouée) et ses compétences (elle a fait ses études au MIT). Elle n’hésite pas non plus à remettre à sa place son « chef » Oliver Queen alias Arrow lorsqu’il semble lui donner des conseils ou des ordres sur son travail : l’informatique est son domaine, où c’est elle qui est la plus compétente. Cependant, sur le terrain, Felicity reprend son rôle de femme qui doit être protégée par le héros (très viril) Oliver, et devient même un intérêt amoureux pour ce dernier à la saison 3.

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geeks-3-24Felicity Smoak (Arrow)

Dans Matrix, l’importance du personnage de Trinity en tant que figure active de l’intrigue suit une trajectoire décroissante, en passant de personnage central ressuscitant Neo à la fin de The Matrix à celui d’intérêt amoureux jouant un rôle secondaire dans The Matrix Reloaded, avant de mourir pendant le volet final de la trilogie.

Le personnage de Lisbeth Salander dans la version du roman de Stieg Larsson et son adaptation suédoise est un personnage affirmé et indépendant qui rompt avec les portraits précédents. L’adaptation récente plus critiquable de David Fincher a été largement analysée dans un article détaillé sur notre site.

Etre mère et informaticienne : mission impossible

Carrie Bowman et Rachel Gibson dans la série Alias sont des femmes douées en informatique et assez intelligentes pour travailler avec le génie Marshall Flickmann (qui reste cependant la figure principale d’autorité en la matière). Mais leur présence à l’écran est très limitée : Rachel est évacuée de la saison 5 assez rapidement, tandis que Carrie se marrie avec Marshall, a un enfant et démissionne de son poste pour s’en occuper à la maison. Parmi les autres héroïnes informaticiennes, seule Chloe dans la saison 7 de 24h a un enfant et mène de front sa carrière et sa vie de famille. Mais ceci se révèlera être un échec puisque son mari et son fils meurent (pour des raisons liées à son travail) et qu’elle quittera son travail pour devenir une pirate hors-la-loi. Des personnages féminins entièrement dédiées à leur carrière proposent des modèles alternatifs à celui de la femme-mère au foyer. Mais le manque de représentations de femmes informaticiennes ayant une famille est symptomatique lorsque l’on considère le fait qu’un certain nombre de femmes quitte le domaine de l’informatique parce qu’il ne leur est plus possible de concilier leur métier et sa culture avec leur congé maternité et la charge d’enfants[11].

L’homme informaticien est aussi majoritairement présenté comme étant célibataire et jeune, pourtant il existe des exceptions notables comme Marshall Flickmann dans Alias qui, contrairement à sa femme, n’arrête pas de travailler parce qu’il a un fils. Jack Stanfield (joué par Harrison Ford) dans le film Firewall est responsable de la sécurité informatique dans une grande banque et doit aider des pirates à s’introduire dans la banque pour sauver sa famille prise en otage. David Eisher dans Äkta Människor (Real Humans) crée des hubots pour redonner vie à sa femme, puis sauver son fils. Et eventuellement Daniel Graystone, dans Caprica, qui poursuit de front l’invention des cylons et la quête de l’avatar de sa fille décédée dans un attentat terroriste.

geeks-3-25Harrison Ford va hacker sa banque pour sauver sa famille des méchants.

***

Les études sur les représentations des informaticien-nes soulignent la persistance de stéréotypes marqués, aussi bien chez les hommes que chez les femmes. Le modèle-type du hacker/geek programmeur entièrement consacré à sa passion, considéré comme l’informaticien par excellence, propose certes un modèle alternatif de masculinité mais il ne dépasse pas les normes genrées qui séparent en deux catégories les préoccupations, les activités et les compétences supposées des hommes et des femmes. Au cours de son histoire, l’image de l’informatique a évolué dans les mentalités : d’un travail de secrétaire considéré comme féminin, elle est devenue un domaine réputé complexe, scientifique et masculin. La culture geek et celle du « brogrammer » soutiennent des espaces encore fortement masculinisé et souvent misogynes, à l’instar du monde des jeux vidéos inextricablement lié à celui des geeks informaticiens que la controverse du GamerGate[12] a mis sur le devant de la scène récemment. Sur ce sujet, je renvoie à l’analyse détaillée de Mar_Lar sur le sexisme chez les geeks et dans les jeux vidéos publiée en 2013. Sur un thème voisin, un article publié sur le site Machisme Haute Fréquence analyse le sexisme envers les « fangirls » en milieu geek.

Le manque de représentation d’informaticien-nes qui ne soient pas des hommes blancs hétérosexuels est une invisibilisation incohérente étant donné l’histoire de l’informatique et les acteurs et les actrices qui y ont pris part : Ada Lovelace est considérée comme étant la première personne à avoir écrit un programme pour ordinateur ; Alan Turing, pionner créateur de l’informatique théorique et de l’intelligence artificielle, était homosexuel ; Evelyn Boyd Granville est l’une des premières femmes Africaines Américaines à avoir obtenu un doctorat en mathématiques et a notamment travaillé en tant que programmeuse sur des programmes aérospatiaux pionniers de la NASA Vanguard et Mercury.

Arroway

Notes

[1] Dans la série, NipAlert est une application qui donne la localisation des femmes dont les tétons pointent. A l’épisode 2, le programme sera tout de même jugé sexiste, pervers et inutile par son créateur lui-même.

[2] Presenting Gender, chapter of Autism and Gender, Jordynn Jack

« This tension derives from the contradiction between the knowledge economy and the service economy : male computer geeks are championed as exemplars of the financial success that can be achieved in the former, yet feminized skills such as emotional intelligence are lauded as keys to success in the latter. WHat is crucial is that traditional hegemonic males are marginalized in both. Those who succeed in the knowledge economy are geeks, and to protect the character of the traditional male (now diminished in his economic productivity), thoses geeks are repeatedly cas as disabled, autistic, and abnormal. »

[3] « The Geek Syndrome », http://archive.wired.com/wired/archive/9.12/aspergers_pr.html

[4] Presenting Gender, chapter of Autism and Gender, Jordynn Jack.

« While systemizing activity and lack of empathy receive great emphasis in the EMB [Extreme Male Brain] theory, other features traditionally linked to autism, such as repetitive behavior and delays in the language development, do not. As I have shown, the kinds of restricted interests mentionned in the EMB theory are most often interests typically associated with men. While there is nothing in the clinical description of autism that requires these interests to be in the specific areas of science, math, and technology, in the EMB theory, feminized interests are excluded. As a result, women have been marginalized in autism research, especially neuroscientific research. Further, male geeks and nerds, much like Zuckerberg in The Social Network, have become stock characters in television, literature, and film ; most often, these characters themselves trope autistic people, mistaking the part for the whole. »

[5] Television on the Spectrum : The Best (and Worst) Depictions of Asperger Syndrome on TV, Sarah Kurchak : « He’s obsessed with pop culture instead of math and science. He clearly has empathy and he’s capable of forming meaningful relationships. So it’s no surprise that he’s been embraced by the Aspie community despite the lack of official diagnosis. »

Egalement : http://mic.com/articles/86995/these-are-the-tv-characters-getting-asperger-s-wrong-from-someone-who-has-it

[6] These Are The TV Characters Gettings Asperger’s Wrong, From Someone Who Has it, http://mic.com/articles/86995/these-are-the-tv-characters-getting-asperger-s-wrong-from-someone-who-has-it :

« Although Sheldon Cooper (Jim Parsons) is often cited as the quintessential TV character with Asperger’s, his quirks are too inconsistent to be definitely categorized as belonging on the autism spectrum. In fact, Sheldon is, if anything, nothing more or less than a run-of-the-mill nerd caricature, cut from the same cloth as Screech Powers or Steve Urkel. All of his esoteric interests and social faux pas can be traced back to those archetypes. If there is any doubt, one can simply turn to series co-creator Bill Prady, who explains that « calling it Asperger’s creates too much of a burden to get the details right. » »

[8] https://en.wikipedia.org/wiki/Lisbeth_Salander#Mental_state

[9] http://jezebel.com/how-hollywood-helps-deter-women-from-computer-science-1452619209:

« Public narratives about a career make a difference. The most common career aspiration named on Girls Who Code applications is forensic science. Like Allen [a 16-year-old girl with an interest in computer programming], few if any of the girls have ever met anyone in that field, but they’ve all watched “CSI,” “Bones” or some other show in which a cool chick with great hair in a lab coat gets to use her scientific know-how to solve a crime. This so-called “CSI” effect has been credited for helping turn forensic science from a primarily male occupation into a primarily female one. »

[10] Effet de genre : le paradoxe des études informatiques, Isabelle Collet http://ticetsociete.revues.org/955#tocto1n3 : « Nous constatons qu’être informaticien, c’est d’abord « créer des programmes », alors que le développement de logiciel est une activité qui devient marginale en informatique, représentant moins de 20% de l’activité. »

[11] Why women leave tech: It’s the culture, not because ‘math is hard’  http://fortune.com/2014/10/02/women-leave-tech-culture/

[12] https://fr.wikipedia.org/wiki/Controverse_du_Gamergate

Autres articles en lien :

41 réponses à Geeks à l’écran (III) : hacker les codes genrés de l’informatique

  1. *tousse*série TV Halt and Catch Fire*tousse*

    • J’en dirais de même. Halt and Catch Fire est une très bonne série sur l’invention des ordinateurs personnels qui a 2 personnages féminins complexes qui sont d’ailleurs les meilleurs programmeurs de la série (et l’une d’elle est mère de famille mariée).

  2. Trilogie d’articles très intéressante, merci.

    Mais fidèle à ma réputation d’increvable optimiste, pour la nouvelle année qui commence, et si on gardait à l’esprit les quelques notes d’espoirs qui nous restent sur ce sujet ?

    Comme le fait qu’on trouve des personnages relevant moins du trope dans des séries pour ados et jeunes adultes, dont on connaît pourtant la tendance acharnée aux stéréotypes les plus marqués ?
    -> Mac dans Veronica Mars (et elle ne fait pas que hacker, elle fait du développement web), Jessie dans Kyle XY (et dans une moindre mesure Andy : pas informaticienne, mais gameuse).

    Comme le fait que des séries qui ont été fondées sur le trope lui-même évoluent au fil des saisons pour revoir la place accordée aux personnages féminins ?
    -> The Big Bang Théory : alors que la saison 1 n’introduit comme personnage féminin que Penny, la « blonde superficielle », on voit ensuite arriver, d’abord comme secondaires récurrentes puis jointes au cast principal, dans cet ordre : Bernadette (physique avantageux, mais scientifique) ; Amy (scientifique, physique peu mis en valeur, difficultés sur le plan « social »).

    C’est peu, OK, mais c’est pas tout à fait rien quand même ?

    • Bonjour,

      ouais, dans les séries c’est globalement moins pire que dans les films. On arrive malgré tout à avoir des persos cool (mes préférées : Abby de NCIS et Lisbeth Salander, Chloe de 24 est juste derrière). Après, dans un certain nombre de cas, les persos féminins se heurtent à d’autres tropes, ce qui gâche un peu l’effet (de mon point de vue).

      Quand à The Big Bang Theory, j’ai beaucoup de mal à regarder cette série, et les quelques tentatives que j’ai faites (sur des saison différentes, donc aussi quand il y avait les autres persos féminins dans le show) ne m’ont pas laissées un très bon souvenir ^^

      • Sur TBBT, certes le show fini par faire apparaître des personnage féminins scientifiques, qui en plus sont aussi tordue et barrées que les personnages masculins mais
        – elle ne sont intégrées que comme « love interest » (avec des guillemets parce que Sheldon-Amy…) d’un personnage masculin
        – aucune femme dans la série ne s’intéresse à la culture « geek », la science ok, mais les super-héros ça reste un truc de mecs…

        • Sur le deuxième point, l’épisode 13 de la saison 6 est particulièrement intéressant. Pendant que les hommes vont à un Comic-Con, les femmes tentent de s’intéresser aux comics. Si je me souviens bien c’est assez gratiné…

          • Je ne sais pas si c’est cet épisode-là ou pas, mais j’ai un souvenir d’un épisode où les mecs vont à une conférence scientifique, ou un truc de geeks, je ne sais plus, et c’est présenté comme parfaitement évident que c’est un truc-de-mecs. Il n’y a même pas la question qui est posée de savoir si éventuellement une des femmes serait intéressée, c’est complètement un postulat de base qu’elles ne le seront pas !

        • Dans mon souvenir (qui peut tout à fait être inexact), la culture geek est rejetée par les filles de la bande non comme un « truc de mec », mais plutôt comme quelque chose d’immature…

          … ce qui nous renvoie sur un autre trope sexiste, celui de l’homme-éternel-gamin/ado face à la femme-mère-responsable, trope justement parfaitement illustré actuellement par la nouvelle publicité mercedes diffusée dans nos cinémas…

          Arf.

          • Ouais, ça m’a l’air de pouvoir être aussi relié au fait que les geeks sont des ados « pas virils » enfermés dans leur monde de geeks, qui deviennent donc plus tard des hommes immatures, par extension des enfants qui restent avec leurs références de SF et leurs jeux. C’est une manière de dévaloriser un certain modèle de masculinité par rapport à celui de l’homme viril responsable et sérieux, que seraient censées rechercher les femmes (qui veulent la sécurité).

      • En parlant d’autisme associé à la masculinité, je pense aussià l’héroïne de Broen.

  3. Je vois un précédent à tout ces personnages, c’est Barbara Gordon, qui incarnait Batgirl jusqu’à être rendue paralytique par le Joker en 1988 (Killing Joke, par Alan Moore, un classique).
    Elle est donc ensuite devenue Oracle, programmeuse, hackeuse, enquêteuse, leader des birds of prey depuis sa chaise roulante…
    Mais ce que les féministes en ont retenue à l’époque, c’est qu’Alan Moore est un sale pourri machiste qui a osé détruire Batgirl.

    • Mais ce que les féministes en ont retenue à l’époque, c’est qu’Alan Moore est un sale pourri machiste qui a osé détruire Batgirl.

      Moore l’a paralysée dans The Killing Jokes et ce sont d’autres auteurs qui l’ont fait devenir Oracle pour ne pas perdre le perso. Donc sur ce coup-là, Moore (malgré tout son génie) n’est pas super défendable…

    • Les super héros ont toujours eu des rapports… Distants avec la mort. Ce qui peut interpeller dans le cas Batgirl, je crois, c’est que le personnage ne s’en est pas remis, au contraire de Batman, qui, il me semble, soit transmet son costume soit guérit quand il est brisé par Bayne… (la mémoire me fait défaut)

      Comme le souligne cette vidéo de la chaine feministfrequency, il y a une réelle tendance à violenter les personnages féminins tandis que les super héros masculins semblent avoir cette espèce d’immortalité…

      https://www.youtube.com/watch?v=DInYaHVSLr8

      Je suis loin d’être experte mais je trouve les paroles de Anita Sarkeesian sont très pertinentes.

  4. Je suis l’archétype de cette vision de l’informaticien :mâle blanc hétérosexuel de moins de 35 ans. J’ai lu cet article avec intérêt, car je déplore le manque de pluralisme dans le domaine. Malheureusement, la réalité des chiffres (c’est à dire de non-blancs, non-hétéros et/où de plus de 35 ans), me paraît très proche de la fiction. Pour moi ce n’est pas donc tellement la représentation faite du domaine qui doit évoluer, mais bel et bien le domaine en lui même.

    • Ben faut bien qu’ils vieillissent les informaticiens… Je veut dire la discipline commence à avoir de l’âge non ? Pourquoi les informaticiens auraient moins de 35 ans ?

      • Premièrement l’informatique a explosé vraiment très récemment, noyant dans une masse de jeunes les plus âgés.
        Deuxièmement, il me semble qu’en France, il y a peu d’évolutions possibles, ce qui fait que les moins jeunes deviennent manager ou chefs de projets et ne font plus de technique. Concrètement ça revient à changer de métier.

      • Je pense que les informaticiens jeunes pourraient faire bcp plus de choses que les plus agés!

        Mais ceci est mon avis
        Je pense que les jeunes grandissent dans la nouvelle technologie et découvre de nouvelles choses ce qui les intéresse encore plus !

    • Malheureusement, la réalité des chiffres (c’est à dire de non-blancs, non-hétéros et/où de plus de 35 ans), me paraît très proche de la fiction. Pour moi ce n’est pas donc tellement la représentation faite du domaine qui doit évoluer, mais bel et bien le domaine en lui même.

      Ce que j’ai essayé de montrer dans la première partie de l’article, c’est comment ces représentations se sont construites et en comment elles influencent le terrain lui-même.
      Typiquement, la plupart des gens ne connaissent pas ce qu’est le milieu informatique de l’intérieur. Eventuellement, illes peuvent avoir des connaissances qui sont informaticien-nes pour leur raconter concrètement comment se passe le métier (ou les activités dans les hackerspaces, etc) par exemple. Mais la majorité des infos que l’on a provient des médias.
      Or, pour avoir envie de faire une activité ou un métier, il faut pouvoir s’y projeter, donc se faire une idée de ce qu’elle est. Les représentations actuelles mettent en avant des caractéristiques qui vont parler surtout (mais pas nécessairement, et pas exclusivement) à des hommes blancs hétéro.

      Par ailleurs, la réalité est de mon point de vue quand même plus variée que ce qui est représentée à l’écran. Il y a eu et il y a encore un phénomène d’invisibilisation de certains groupes, et une sorte d’uniformisation des personnages d’informaticien-nes par rapport à leurs occupations et leur personnalité.
      Si on considère les médias, en particulier le cinéma, comme un vecteur puissant pour inspirer les gens et faire évoluer la réalité vers plus de diversité (cf l’effet « Les Experts » pour la forensique), alors on peut envisager que changer les représentations aidera à changer le milieu.

    • Le domaine doit-il évoluer?
      A mon sens, le projet de société que l’on voudrait, c’est une société, ou chacun est véritablement libre de ses choix. Pas une société ou tous les domaines doivent être paritaires. Autrement dit, à mon avis ce qui est important ce n’est pas qu’il y ait plus de n% de femmes (ou d’hommes) dans tel secteur, mais que les femmes (ou les hommes) qui veulent aller dans tel secteur ne s’autocensurent pas. Et pour ce faire, il serait plus pertinent de changer la représentation du milieu que le milieu en lui-même. Faire évoluer le milieu lui-même, c’est possiblement aller contre les envies des gens. Faire évoluer la représentation du milieu à l’écran, c’est montrer qu’il est possible de réussir dans ce milieu si on est une femme, un ou une Noire, un ou une homosexuelle, etc.

      • A partir du moment où un domaine a tendance à très nettement tendance à mettre à l’écart une majorité de la population (car la majorité de la population est de genre féminin et non-blanche), j’ai envie de dire que oui, il doit évoluer…

        Faire évoluer le milieu lui-même, c’est possiblement aller contre les envies des gens.

        En quoi avoir une couleur de peau foncée ou certains organes plutôt que d’autres peut bien avoir un rapport avec l’envie d’une personne de travailler dans un domaine, si ce n’est par la manière dont elle est vue socialement et rejetée en raison de ces marqueurs ?

        • A partir du moment où un domaine a tendance à très nettement tendance à mettre à l’écart une majorité de la population (car la majorité de la population est de genre féminin et non-blanche), j’ai envie de dire que oui, il doit évoluer…

          Oui il doit évoluer dans le sens ou une femme (ou autre minorité) ne doit pas rencontrer d’hostilité, de mépris, ou d’ostracisme dans le milieu, ça je suis d’accord.
          Mais l’objectif est que le milieu puisse accueillir tout type de personne façon neutre, et pas que chaque minorité soit représentée dans le milieu de la même façon que dans la population générale. Ce qu’on peut faire, c’est rendre un milieu accueillant. Ce qu’on ne peut pas faire, c’est décider à la place des populations dans quelle mesure elles veulent occuper différentes professions.

          En quoi avoir une couleur de peau foncée ou certains organes plutôt que d’autres peut bien avoir un rapport avec l’envie d’une personne de travailler dans un domaine, si ce n’est par la manière dont elle est vue socialement et rejetée en raison de ces marqueurs ?

          D’un million de façon différentes. Une personne avec certains organes ou une certaine couleur de peau peut décider elle-même que le milieu ne l’intéresse pas avec une probabilité différente qu’une autre personne d’une autre couleur de peau ou avec d’autres organes. Il faut savoir respecter ça.

          Mon point, c’est que la mesure de l’ouverture d’un domaine à une minorité ne peut pas consister uniquement en la proportion de ladite minorité dans ledit milieu. Parce que la volonté des représentants de la minorité en question doit être prise en compte.

      • J’ai l’impression que vous (Babar John) vivez dans une société où il n’y a guère de rapports de force, de pouvoir et de domination. Vous semblez ne pas voir que si les femmes par exemple, n’intègrent pas certains domaines, c’est aussi parce qu’il y a une résistance de la part des hommes à leur entrée. C’est vrai dans l’informatique, comme dans différentes sphères de la politique par exemple. Sur cette histoire de parité puisque vous en parlez, vous savez que certains partis préfèrent payer les amendes que de présenter des femmes sur leurs listes, ou bien que ces dernières sont présentées à des endroits où on sait que leur parti ne gagnera pas.
        Le système ne se perpétue pas (intégralement) de lui-même, il continue aussi parce que certaines personnes ont intérêt à ce que cela reste ainsi. Ce n’est pas seulement les femmes et les racisé-e-s par exemple qui s’autocensurent (harcèlement, insultes, etc.), c’est aussi les dominants qui les pressent et les poussent à le faire. Dans la plupart des histoires de rapport de domination, l’erreur consiste souvent à croire que les victimes du système existent sans qu’il y ait de coupables.

        • Ah, mais j’ai été témoin moi-même de sexisme dans le domaine de l’informatique, donc je veux bien croire qu’il existe! (même si je n’en avais pas été témoin, je voudrais bien croire qu’il puisse exister).
          Je suis d’accord pour dire que les résistances de la part de la populations majoritaire doive être combattues. Mais l’objectif ne devrait pas être la parité. On saura qu’il n’y a plus de discrimination dans l’informatique, pas forcément quand il y aura 50% de femmes dans le milieu, mais quand les femmes qui y seront arriveront à se placer professionnellement avec la même facilité que les hommes à compétence et aspirations égales.

          • Bonsoir, je me permet de rebondir sur votre commentaire,

            « Une personne avec certains organes ou une certaine couleur de peau peut décider elle-même que le milieu ne l’intéresse pas avec une probabilité différente qu’une autre personne d’une autre couleur de peau ou avec d’autres organes. Il faut savoir respecter ça. »

            La question est : pourquoi ?

            Pourquoi les femmes vont-t-elles décider que l’informatique ne les interesse pas ?

            Par exemple pourquoi les filles en Europe n’aiment pas le foot ? Alors qu’il n’y a rien de génétique ou d’hormonal dans l’amour du foot, puisqu’aux US le « soccer » est un sport majoritairement pratiqué par les filles.

            Tout simplement parce qu’on repète aux gamines depuis leur enfance : le foot c’est pas pour les filles, les filles sont nulles en maths, les filles sont douces et gentilles, etc…

            L’idée n’est pas d’aller contre les envies des gens, l’idée est d’offrir un panel de possibilités de montrer aux petites filles qu’elles peuvent tout faire, montrer des modèles positifs de femmes travaillant dans tous les domaines, afin de leur donner envie de s’y interesser.

            Si on enseigne l’informatique et les matières scientifiques et que les gens décident après que ça les interesse pas, OK.

            Si on enseigne une matière en disant « les filles sont nulles, ça ne les interesse pas, c’est un truc de mec » forcément les filles ne seront pas interessées ou n’oseront pas y aller…

          • Bonjour,

            L’idée n’est pas d’aller contre les envies des gens, l’idée est d’offrir un panel de possibilités de montrer aux petites filles qu’elles peuvent tout faire, montrer des modèles positifs de femmes travaillant dans tous les domaines, afin de leur donner envie de s’y interesser.

            Si on enseigne l’informatique et les matières scientifiques et que les gens décident après que ça les interesse pas, OK.

            Si on enseigne une matière en disant « les filles sont nulles, ça ne les interesse pas, c’est un truc de mec » forcément les filles ne seront pas interessées ou n’oseront pas y aller…

            Exactement.
            Nous sommes en fait tout à fait d’accord. L’objectif est de présenter la matière ou le milieu de façon à ce que tous ceux et celles qui s’y intéressent puissent y évoluer selon leurs capacités.
            Une fois qu’il est mesuré que la minorité, à capacité et aspiration égale, peut intégrer le milieu avec la même facilité que la majorité, la question de savoir pourquoi la minorité s’y intéresse (ou pas) ne nous regarde pas.

            Donc pour moi, la question ce n’est pas « quel pourcentage de femmes y-a-t-il dans l’informatique? », mais « une femme peut-elle devenir informaticienne et y réussir aussi facilement qu’un homme à capacités et aspirations égales? ».

  5. Je viens de découvrir l’existence d’une série avec un personnage de hackeuse potentiellement intéressante : Eye Candy (http://fr.wikipedia.org/wiki/Eye_Candy_%28s%C3%A9rie_t%C3%A9l%C3%A9vis%C3%A9e%29). Après je l’ai pas vue, donc je sais pas du tout ce que ça peut donner politiquement. Voilà le trailer branchouille et totalement inutile 🙂 : http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19550116&cserie=17314.html

    et sinon, dans les personnages de geeks cools qui sortent de la norme masculine cis blanche hétéro, je repense à Cosima dans la série Orphan Black, qui est lesbienne et juste trop cool. Je crois que c’est mon perso préféré de la série. Et cette série est d’ailleurs pas mal du tout politiquement si je me souviens bien, surtout la dimension sororité et solidarité féminine pour lutter contre l’oppresseur.

    • Orphan Black est plutôt cool d’un point de vue féministe, pas mal de perso féminins importants et de la solidarité féminine… Je suis plus dubitative, vis à vis de la representation de Félix qui est gay et assez cliché.

    • Concernant Eyecandy les trois premiers épisodes se résument : barbie hackeuse rebelle et cyberflic ken luttent contre super hacker stalker. Très décevant.

  6. Je suis un autre de ces archétypes, ma fille est autiste et je pense moi même ne pas avoir été diagnostiqué. Je suis heurté par ce que je viens de lire. La théorie du cerveau hypermasculin s’appuie sur une prévalence de testostérone dans le liquide amniotique (elle même souvent mais pas toujours provoquée par la consommation de fruits et légumes excessivement exposés à l’étylène servant à les faire murir artificiellement lors du transport).
    « Confondre une particularité de l’autisme avec la totalité » est une notion vide de sens. En effet on appartient au spectre autistique, l’autisme n’est pas un booléen (oui/non), on est plus ou moins autisme. Asperger lui-même ou « autisme de haut niveau » est un syndrome suffisamment mal défini pour que les chercheurs renoncent à une classification claire. Enfin tout ça n’a rien à voir avec changer les couches ou jouer au foot. Les autistes sont aussi capables d’empathie que les autres (enfin déjà ils sont tous différents) mais ils ne le témoignent pas forcément bien. C’est même souvent un mécanisme de protection émotionnel face à une sensibilité hyper-développée qui provoque une grande souffrance.
    Sinon je suis parfaitement d’accord avec Abed (♥) et à ne pas percevoir Sheldon Cooper comme un autiste « authentique ». (bizarre cet ostracisme à l’envers)
    Je remonte continuer l’article mais je vous encourage en passant à visionner le très bon Cybertraque (Takedown) dont vous n’avez pas parlé et qui présente deux portraits de hackers en compétition, l’un white-hat l’autre black-hat au personnalités complexes loin des stéréotypes et basés sur des faits réels.

    • « Confondre une particularité de l’autisme avec la totalité » est une notion vide de sens. En effet on appartient au spectre autistique, l’autisme n’est pas un booléen (oui/non), on est plus ou moins autisme.

      Au cas où il y ait un malentendu: au sujet de l’expression que vous citez entre guillemets, j’essayais de traduire (de manière un peu maladaroite, mais j’ai eu du mal à trouver mieux) : « mistaking the part for the whole. » L’idée derrière n’est absolument pas celle de degré, comme vous l’expliquez très bien en parlant de spectre de l’autisme, mais plutôt du fait que des personnes diagnostiquent l’autisme en se basant sur quelques pseudo-caractéristiques (comme l’intérêt pour les sciences, par exemple) et en ignorant d’autres éléments nécessaires à un diagnostique médical.

  7. « on considère le fait qu’un certain nombre de femmes quitte le domaine de l’informatique parce qu’il ne leur est plus possible de concilier leur métier et sa culture avec leur congé maternité et la charge d’enfants »
    Dans la réalité, le temps passé au travail dans ce domaine très particulier n’a presque aucun point de comparaison avec les autres secteurs (du moins la plupart). Le Crunch-time assez fréquent fait que de très nombreux programmeurs (et autres informaticiens pour faire court) passent l’essentiel de leurs nuits sur leur lieu de travail. Une méthode dont je crois Steve Jobs à l’origine (il montait ses équipes les une contre les autres par la menace de licenciement, ne payait pas les heures sup et justifiait l’ensemble par « On est en train de changer le monde, si vous êtes là pour l’argent, vous n’êtes pas des nôtres »).
    Les class-actions se sont d’ailleurs multipliées aux Etats-Unis ces dernières années à l’image des Rockstar-Spouses (épouses des employés de la firme Rockstar qui ont intenté un procès à la société au motif que leurs maris ne rentraient plus. Je caste moi-même parfois des programmeurs et l’on trouve sur les CV nombre de phrases surréaliste du genre « Je suis capable de travailler une semaine d’affilée sans dormir », c’est très fréquent et assez effrayant alors que, à ma connaissance, ce secteur est l’un des moins touchés par la crise, précisons-le.

    • Dans la réalité, le temps passé au travail dans ce domaine très particulier n’a presque aucun point de comparaison avec les autres secteurs (du moins la plupart). Le Crunch-time assez fréquent fait que de très nombreux programmeurs (et autres informaticiens pour faire court) passent l’essentiel de leurs nuits sur leur lieu de travail.

      Ce qui est surtout le signe d’un mauvais management et d’une mauvaise gestion de la livraison des produits, mais passons :p
      Il y une autre raison très souvent invoquée pour le fait que les informaticien-nes restent tard le soir (ou arrive très tôt le matin, au contraire): c’est pour avoir les bureaux vides sans personne, et pouvoir ainsi se concentrer sans interruption pour coder !

  8. Il me parait intéressant également de souligner la confusion fréquente (et fréquemment dénoncée entre promoteurs informatiques (notamment Steve Jobs et Bille Gates) et informaticiens (Steve Wozniak, Paul Allen). Si les premiers ont généralement quelques bases, ce sont avant tout des commerciaux, des communiquants et à ce titre ils boivent, draguent de façon directe et savent faire la fête.
    Dans la vraie vie, les filles sont ultra-rares dans ce monde (à Paris du moins) et les brogrammers ne doivent pas faire une carrière mémorable car les techniciens sont souvent évalués à l’embauche par d’autres techniciens et je subodore que leurs codes sont trop différents pour inspirer la confiance et le respect mutuel.

    Ceux que je connais ne boivent pas ou très peu et se vautrent avec bonheur dans les clichés (barbes, tee-shirts bizarres, junk-food, loisirs passés à jouer aux jeux vidéo, à parler d’Harry Potter, des jeux 8bits, de sous-cultures rock, de séries, de japanimation, de Donjons & Dragons voire… de féminisme!). Je pense que ces stéréotypes sont fondés sur du vécu car ils sont récents mais déjà vieux de plusieurs décennies. Les causes et les effets sont peut être à inverser mais la corrélation est souvent évidente. Après je suis peut-être au cœur du stéréotype et on peut en s’en éloignant raffiner les profils (un vendeur d’informatique par exemple est souvent également un geek) – mais déjà le terme Geek a été instrumentalisé, redoré après la période infamante des eighties, afin de stimuler et d’étendre une fausse culture de groupe pour vendre massivement des téléphones hors de prix avec un taux de remplacement annuel exceptionnellement haut. Le terme est à utiliser avec beaucoup de soin et les principaux intéressés s’en méfient.
    Je fais partie également du bureau du Petit Fablab de Paris et là en revanche, sur des tâches plutôt axées sur l’ingénierie expérimentale, les femmes (de tous âges) sont assez présentes quoique sensiblement minoritaires mais elles se font naturellement leur place dans un milieu qui ne se veut pas fait « par des hommes et pour des hommes » et pratique la parité sans contrainte ni quotas.
    Vous n’avez pas parlé de Cameron Howe de Halt and Catch Fire, personnage féminin paraissant très stéréotypé au départ qui finit par être plutôt crédible et psychologiquement fouillée. Je me rappelle également d’une fillette récurrente dans les films Robocop, hackeuse autiste de dix ans, surdouée et totalement caricaturale, qui incarne aussi une part de cet inconscient collectif. Job dans la série Banshee, un travesti plutôt hors normes, Edward Wong (une fille mais ça n’est pas sûr) dans Cowboy Bebop, Lisa dans le film Nirvana. Cela me fait remarquer que traditionnellement (on peut déjà presque dire ça) elles ont très souvent les cheveux colorés (ceci renvoyant en sous-texte à la culture punk donc plutôt cyberpunk)
    Quant à Zoe dans Caprica, le message est clair : si son père a mis au point le corps des Cylons elle en est bel et bien l’âme et d’ailleurs elle le devient littéralement en « chargeant sa conscience » dans la machine. Dernier point : Dans ghost In The Shell, (Comment ne pas en parler ?) Motoko finit par « fusionner » avec le projet 2501, intelligence artificielle perçue comme mâle mais s’incarnant dans des corps artificiels féminins, dans un objectif avoué de reproduction (selon les termes même de 2501). Quant on revoit plus tard l’objet de cette fusion, le corps de ce qui abrite les deux êtres fusionnés est celui d’un enfant d’un nouveau genre, fusion parfaite entre l’homme et la machine.

    • Il me parait intéressant également de souligner la confusion fréquente (et fréquemment dénoncée entre promoteurs informatiques (notamment Steve Jobs et Bille Gates) et informaticiens (Steve Wozniak, Paul Allen). Si les premiers ont généralement quelques bases, ce sont avant tout des commerciaux, des communiquants et à ce titre ils boivent, draguent de façon directe et savent faire la fête.

      Oulala, on enfile cliché sur cliché sur les “commerciaux” là 😮

      Dans la vraie vie, les filles sont ultra-rares dans ce monde (à Paris du moins)

      Les femmes développeuses sont certes plus rares, mais pas non plus “ultra-rares”… C’est surtout qu’elles sont disséminées dans plein de structures différentes, ce qui donne un effet d’isolation assez puissant.

      et les brogrammers ne doivent pas faire une carrière mémorable car les techniciens sont souvent évalués à l’embauche par d’autres techniciens et je subodore que leurs codes sont trop différents pour inspirer la confiance et le respect mutuel.

      J’ai pas l’impression en effet que l’effet soit arrivé en France encore, mais j’aurais tendance à dire que c’est un peu différent outre-atlantique.

      Ceux que je connais ne boivent pas ou très peu et se vautrent avec bonheur dans les clichés (barbes, tee-shirts bizarres, junk-food, loisirs passés à jouer aux jeux vidéo, à parler d’Harry Potter, des jeux 8bits, de sous-cultures rock, de séries, de japanimation, de Donjons & Dragons voire… de féminisme!).

      J’ai une expérience très différente : aficionado de whisky twaïnais, brasseur de bière amateur, esthète du café, gastronome, barbe, sans barbe, randonneurs plus ou moins extrême, voyageurs à vélo, pratiquants de snow board, musiciens, amateurs de musique électro, de métal, de musique classique ou de hip-hop, “fétichiste” des bibliothèque… tout citer serait fastifieux. Il y a aussi souvent des goûts qui se raccrochent d’une manière ou d’une autre à la culture geek, mais c’est loin d’englober la totalité des goûts et personalités de chacun-e (je précise que je suis aussi du métier).

      Vous n’avez pas parlé de Cameron Howe de Halt and Catch Fire, personnage féminin paraissant très stéréotypé au départ qui finit par être plutôt crédible et psychologiquement fouillée.

      J’ai découvert la série juste après avoir publié l’article ^^ Mais je n’ai pas encore pris le temps de la regarder.


      Je me rappelle également d’une fillette récurrente dans les films Robocop, hackeuse autiste de dix ans, surdouée et totalement caricaturale, qui incarne aussi une part de cet inconscient collectif. Job dans la série Banshee, un travesti plutôt hors normes, Edward Wong (une fille mais ça n’est pas sûr) dans Cowboy Bebop, Lisa dans le film Nirvana. Cela me fait remarquer que traditionnellement (on peut déjà presque dire ça) elles ont très souvent les cheveux colorés (ceci renvoyant en sous-texte à la culture punk donc plutôt cyberpunk)

      Ouais, j’avais remarqué un truc du genre dans certaines séries : quand la hackeuse est du côté des gentils, elle peut avoir un look normal. Quand elle bascule du côté obscure, elle prend un look cyberpunk. Ex: Felicity Smoak quand on la voit jeune dnas un des épisodes; Chloe dans la dernière saison de 24h; Lisbeth Salander.

      Quant à Zoe dans Caprica, le message est clair : si son père a mis au point le corps des Cylons elle en est bel et bien l’âme et d’ailleurs elle le devient littéralement en « chargeant sa conscience » dans la machine.

      Le cas de Zoe m’embête un peu : c’est surtout son avatar, donc une intelligence artificielle, dont on parle dans la série. Elle est vue d’avantage en tant qu’instance consciente programmée par la Zoe originale qu’en tant que programmatrice et technicienne. J’ai plutôt l’impression qu’on la voit en train de bouder ou d’essayer de communiquer avec son père plutôt qu’en train de faire des robots…

      Dernier point : Dans ghost In The Shell, (Comment ne pas en parler ?) Motoko finit par « fusionner » avec le projet 2501, intelligence artificielle perçue comme mâle mais s’incarnant dans des corps artificiels féminins, dans un objectif avoué de reproduction (selon les termes même de 2501). Quant on revoit plus tard l’objet de cette fusion, le corps de ce qui abrite les deux êtres fusionnés est celui d’un enfant d’un nouveau genre, fusion parfaite entre l’homme et la machine.

      Là aussi, Motoko est l’intelligence artificelle, pas une programmeuse en tant que telle. Par ailleurs, le sexisme et le male gaze sont assez terribles dans le film, mais c’est un autre sujet.

  9. Aaah mince, pardon d’être long mais il serait important de se pencher sur le film Weird Science également, film des années 80 qui voit 2 geeks créer grâce à un ordinateur et des photos de playboy la femme parfaite qui prend alors vie (magiquement) et commence à prendre en charge leur vie d’éternels opprimés au collège.
    Ce mythe de Frankenstein, l’humain créant la vie pour en perdre le contrôle, renvoie à la différence essentielle entre hommes et femmes : Le fait de porter un enfant. C’est pour cette raison je pense que la plupart des concepteurs de vie artificielle (dans les séries du moins) sont des hommes.
    Vous avez également oublié un personnage essentiel : Allegra Geller dans le film eXistenZ, la programmeuse de génie.
    Merci d’avoir mentionné Ada Lovelace, peut-être également pouvait-on penser à Marie Curie même si l’uranium et le silicone ne se manipulent pas de la même façon, ils sont des composantes essentielles de la modernité technologique et souvent de la science-fiction (post-nucléaire en l’espèce).
    D’ailleurs, il semble qu’il y aie une forte majorité de femmes dans le domaine scientifique de la Biologie, à vérifier et si c’est vrai (je le crois), à souligner. Encore pardon d’avoir floodé cette page mais ce sujet m’intéresse beaucoup et depuis longtemps.

    • Ce mythe de Frankenstein, l’humain créant la vie pour en perdre le contrôle, renvoie à la différence essentielle entre hommes et femmes : Le fait de porter un enfant. C’est pour cette raison je pense que la plupart des concepteurs de vie artificielle (dans les séries du moins) sont des hommes.

      Il y a en effet tout un sujet ici qui a d’ailleurs été déjà explorer par des chercheurs/euses.
      Pour résumer, cela part du principe que les femmes se « reproduisent », que les hommes « produisent », que les hommes se sentent diminués de ne pas pouvoir donner la vie (alors qu’un enfant, chez les humains, ça demande des gamètes et mâles et femelles, mais passons), et qu’ils veulent pouvoir créer la vie tout seul.
      Si cela vous intéresse, il y a notamment tout un chapitre sur le sujet dans le bouquin « l’informatique a-t-elle un sexe » d’Isabelle Collet.

      Vous avez également oublié un personnage essentiel : Allegra Geller dans le film eXistenZ, la programmeuse de génie.

      Ah cool, je connaissais pas le film.

      D’ailleurs, il semble qu’il y aie une forte majorité de femmes dans le domaine scientifique de la Biologie, à vérifier et si c’est vrai (je le crois), à souligner.

      Elles sont à peu pèrs à 60% dans les hautes études d’après ce graphique: http://www.lecinemaestpolitique.fr/wp-content/uploads/2014/12/geeks-1-2.png

  10. C’est possible d’avoir genre un moteur de recherche comme celui de penelope garcia dans Esprits criminels un truc dans ce genre?
    j’aimerais avancer un connaissance dans l’informatique qq pourrait eventuellement m’aider svp!

  11. C’est vrai que c’est super chouette de voir plus de femmes hackeuses (et autistes, qui plus est!) dans les séries.
    Cependant, cela ne fait que reproduire des clichés (même bénins): les autistes n’aiment pas forcément tous l’informatique.
    Certains.es d’entre nous ont un/des intérêts spécifiques* pour la pop-culture, les animaux, le féminisme, etc…
    Par ex, pour moi, c’est le cinéma bizarre/la littérature enfantine/ le surréalisme et le féminisme.

    *: voir cette super vidéo (en anglais) :
    https://youtu.be/ytWwFr5_pbY

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