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Les femmes du bus 678 (2010) : un appel à lutter contre nos sociétés patriarcales

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Les femmes du bus 678 est un film égyptien sorti en 2010 qui raconte le parcours de trois femmes égyptiennes faisant face à des agressions sexuelles. Le film est sorti quelque temps seulement après le premier procès pour agression sexuelle qui ait eu lieu en Egypte et alors que les agressions sexuelles sont un sujet d’ampleur mais majoritairement tabou dans le pays.

Le film me semble particulièrement bien construit en ce qu’il prend soin d’explorer de manière non simpliste les différentes dimensions sociales et genrées du sujet tout en véhiculant un message féministe subtil, positif et pragmatique s’adressant aux femmes ainsi qu’aux hommes.

Des violences partout et tout le temps

Le film met en scène trois femmes aux parcours différents : Fayza est une mère de famille mariée, qui travaille pour le gouvernement et lutte pour joindre les deux bouts ; Nelly est une jeune femme fiancée de classe moyenne qui fait du stand-up ; enfin Seba est une femme divorcée sans enfant et de classe aisée, qui conçoit des bijoux.

Rien ne semble les rapprocher, que cela soit leur classe sociale, leur métier, leur statut marital, les proches à leur charge, les milieux qu’elles fréquentent. Elles s’habillent différemment, se maquillent ou non, sont voilées ou non, prennent le bus ou leur voiture pour sortir. Le propos du film en est donc d’autant plus fort : toutes les femmes subissent ou peuvent subir des violences de la part d’hommes. Il ne s’agit pas d’un problème qui ne concernerait que des populations pauvres, des profils de femmes en particulier ou des comportements spécifiques (comme ne pas être voilée et ainsi d’avantage attirer l’attention des hommes, par exemple). Le réalisateur et scénariste Mohamed Diab explique avoir été particulièrement attentif à mettre en scène trois portraits de femmes issues de milieux différents : « Les personnages du film représentent trois classes sociales. En Egypte, il est si sensible de parler d’agression sexuelle que si j’avais seulement montré un personnage pauvre, les gens pauvres m’auraient dit « vous nous insultez ! ». Si j’avais montré une femme riche, les gens riches m’auraient dit la même chose. Il fallait donc être équitable. »

Les agressions endurées par les trois femmes prennent place dans des contextes différents. Il s’agit cependant à chaque fois d’agressions dans un espace public : Fayza est victime d’attouchements à répétition dans le bus ; Nelly est harcelée par téléphone dans son poste au call center et est sommée par son patron de rester polie et patiente avec ses interlocuteurs ; plus tard dans la rue, elle est pelotée, empoignée par un occupant d’une voiture et trainée sur plusieurs mètres alors qu’elle traversait la rue ; enfin Seba est emportée dans la foule et agressée par un groupe d’hommes à la sortie d’un match de football.

L’omniprésence des agressions à caractère sexuel sur les femmes dans l’espace public et leurs répercutions dans l’espace domestique souligne leur banalisation dans la société et le sentiment d’impunité de la part des agresseurs du au fait qu’il est réprouvé pour les femmes de dénoncer leurs actes. Le film ne montre pas des scènes spectaculaires à la violence graphique et à la longueur difficilement supportables (comme peuvent être filmés les viols dans certains films). Au contraire, la rapidité, la répétition et les formes multiples des agressions retranscrivent le quotidien des femmes qui les subissent, avec toute la souffrance, la colère et le sentiment d’impuissance qu’elles peuvent générer. Et le tableau n’en est pas moins édifiant et oppressant.

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Leçon n°1 du Petit Guide du Patriarcat : faire preuve de diplomatie avec son harceleur.

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Leçon n°2 du Petit Guide du Patriarcat : poursuivre en justice son agresseur entache la réputation de la victime.

 

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Leçon n°3 du Petit Guide du Patriarcat : la police a autre chose à faire que de s’occuper des infractions mineures que sont les agressions sexuelles.

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Leçon n°4 du Petit Guide du Patriarcat : les hommes épousent des femmes uniquement pour le sexe, donc les femmes ne doivent pas se refuser à leur mari.

Dans la sphère privée, c’est une autre forme de violence qui est établie par les hommes – et plus largement la famille et la société – relativement à ces incidents : l’indifférence, la minimisation des agressions vécues, l’absence de soutien émotionnel et l’injonction au silence. Le mari de Seba, qui assiste impuissant à la scène d’agression de sa compagne, quitte leur maison à la suite de l’incident : dans l’histoire, ce n’est pas sa femme mais lui qui souffre et dont l’honneur est atteint étant donné qu’il n’a pas pu la défendre. Il se place en vraie victime de l’agression et n’apporte aucun soutien à sa femme qu’il abandonne.

Nelly fait face à une situation différente puisque sa famille et son fiancé ne se détournent pas d’elle. Mais quand elle décide de maintenir sa plainte contre son agresseur, elle subit un chantage de la part de sa famille, son fiancé et sa future belle-famille : si elle poursuit son agresseur en justice pour agression à caractère sexuel, elle apportera le déshonneur sur elle et sa famille, ce qui provoquera l’annulation de ses fiançailles.

Fayza, enfin, reste silencieuse sur les incidents dans le bus, mais doit endurer en sus les sollicitations sexuelles de son mari, envers elles ou d’autres femmes.

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Le comportement de l’inspecteur Essam, témoigne aussi de l’indifférence et du paternalisme des hommes vis-à-vis des femmes : il ne prend pas au sérieux Fayzal et ses amies lorsqu’elles viennent avouer qu’elles sont responsables des attaques du bus 678 de la même façon qu’il n’écoute pas sa femme enceinte peu avant qu’elle ne meure.

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lol, imaginez si les femmes se défendaient toutes seules.

Face aux agressions sexuelles : plusieurs moyens de luttes

Les femmes du bus 678 peut se visionner comme un manuel référençant différents moyens de lutte et d’auto-défense que les femmes peuvent mettre en œuvre, de manière individuelle ou collective. Il y a d’abord la défense physique, immédiate : refuser, comme Fayza, d’être touchée par des hommes et riposter. Tout peut constituer une arme, même une épingle habituellement utilisée pour attacher son voile : femme voilée n’est pas synonyme de femme soumise et sans défense (. Il y a ensuite les groupes de soutien et les ateliers d’auto-défense à destination des femmes organisés par Seba, qui utilisent les grands média pour s’adresser aux femmes et les encourage à sortir du silence et de la honte des agressions pour dire haut et fort que celles-ci ne sont pas acceptables.

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Inspirée par Seba qui lui fait remarquer que même une épingle peut servir d’arme, Fayza met en place un système de défense qui attire l’attention de la police : en attaquant les hommes qui l’agresse dans les parties génitales, ce sont les agresseurs qui appréhendent désormais de prendre le bus.

Nelly raconte aussi sur scène devant un public majoritairement masculin et décontenancé son agression : c’est un moyen pour elle d’exprimer sa colère et sa frustration et de rompre la loi du silence.

Enfin il y a les poursuites judiciaires, avec Nelly qui entame le premier procès qui ait jamais eu lieu pour agression sexuelle.

Mais ce qui permet à ces femmes de tenir bon, c’est surtout de savoir qu’elles ne sont pas seules, isolées à vivre des agressions et à vouloir se battre contre l’ordre établi autour d’elle. Leur rencontre est le point de convergence de l’histoire, le film montre le soutien mutuel qu’elles s’apportent comme la colonne vertébrale de leur lutte collective, enracinée dans le partage d’expériences personnelles semblables. Les femmes ne sont pas des victimes passives endurant en silence les violences : ce sont, chacune à sa manière, des battantes émancipée des hommes qui prennent leur vie en main. « Ne me libère pas, je m’en charge ».

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Avant la médiatisation du procès de Nelly et les attaques dans les bus…

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 Après…

Fayza ne dit mot à son mari, Seba refuse de se remettre avec son mari lorsque celui-ci refait surface en s’excusant de l’avoir abandonnée et Nelly continue les poursuites judiciaires même sans le soutien de son fiancé.

Le film ne fait pas non plus l’impasse sur une thématique importante. Il montre en effet comment les injonctions et les normes patriarcales sont intégrées par les femmes elles-mêmes et peuvent les faire désigner d’autres femmes comme coupables de ce qui leur arrive. Ainsi, Fayza explique les agressions dans les transports en rejetant la faute sur les femmes non-voilées qui porteraient des tenues trop sexy comme Nelly et Seba, qui exciteraient la concupiscence des hommes en mettant en avant leurs charmes et les laisseraient les toucher. Seba contre-attaque en désignant les « idées rétrogrades » supposées des femmes comme Fayza. Ne restant pas sur cette explication simpliste, le film montre peu après une scène où Fayza surprend dans le bus une femme voilée comme elle qui ne réagit pas lorsqu’un homme se frotte à elle. Culpabiliser les femmes sur leur apparence vestimentaire semble donc bien une fausse piste. Pour autant, le film ne perd pas son regard bienveillant sur Fayza puisqu’elle se réconcilie ensuite avec ses deux amies et fait preuve d’un grand courage pendant la totalité du film : déconstruire ses préjugés et les normes que l’on a intégrées est montré comme un processus progressif.

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« C’est la faute des femmes aux idées rétrogrades qui se voilent. »

 

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« C’est la faute des femmes aux idées modernes qui ne s’habillent trop moulants et montrent leurs cheveux. »

Quoi que les femmes fassent, elles sont sûres d’être coupables des agressions qu’elles subissent.

Prises de conscience masculines

Le film réalise 3 portraits de femmes qui rendent compte de leur complexité. De la même façon, et en prenant soin de les laisser en second rôle, Mohamed Diab construit des personnages masculins variés qu’il fait évoluer durant le film. Les héroïnes s’émancipent des hommes dans leur vie. Ces derniers, eux, effectuent un chemin inverse : prendre conscience de la réalité vécue par l’ « autre » (les femmes), accepter de se mettre en retrait et soutenir les femmes dans leurs prises de parole et leurs actions.

Le film montre comment les hommes peuvent devenir des alliés : le fiancé de Nelly qui choisit de la soutenir au tribunal malgré les répercussions sociales et médiatiques, a pris conscience de l’importance de la démarche pour son amie et décide de faire passer ses propres intérêts au second plan.

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L’inspecteur Essam, qui écoutait d’une oreille distraite son épouse parler et traitait avec complaisance les agresseurs sexuels et avec paternalisme les femmes, se projette soudain dans la réalité de ce qu’est être une femme dans la société : c’est en regardant sa fille qui vient de naître, alors que sa femme est morte en couche, qu’il parvient à mesurer l’impact des violences en se mettant à sa (future) place. On pourrait soupçonner ici la reproduction d’un certain paternalisme, le père souhaitant classiquement protéger sa fille contre les autres hommes. Mais cela serait contradictoire avec le discours du film qui montre une lutte des femmes elles-mêmes pour le respect de leurs droits. Sans compter que c’est de cette manière que le réalisateur Diab explique avoir pris conscience du problème structurel des violences faites aux femmes, ce qui l’a amené à faire un film sur ces trois héroïnes courageuses. Le tournage du film a lui-même joué un rôle pour révéler l’ampleur du phénomène à Diab, qui raconte qu’alors qu’ils filmaient la foule après un match de foot gagné par l’Egypte, la figurante qui remplaçait l’actrice (qui n’était pas venue par peur) a réellement été agressée sans que l’équipe n’ait pu intervenir dans la foule.

Contrer certains discours racistes

 

Les femmes du bus 678 est un film égyptien réalisé à destination de la société égyptienne. Sa diffusion vers des publics occidentaux comme celui de la France présente des éléments qui m’ont semblé intéressants dans la perspective de déconstruire certains discours et représentations du féminisme blanc raciste.

Tout d’abord – même si cela n’est a priori pas forcément identifiable par un public peu renseigné sur ces questions -, si le film se déroule dans un cadre donné qu’est la société égyptienne contemporaine, il est suffisamment complexe et bien construit pour que l’on puisse reconnaître les mêmes mécanismes sexistes à l’œuvre dans notre propre société française. Peu de femmes osent par exemple avouer en public ou à leur entourage qu’elles ont été victimes d’agression sexuelle et de viol, par honte et par crainte d’être culpabilisée (« elles ont provoqué », « elles n’ont sûrement pas dit « non » assez fort », « elles exagèrent l’impact de l’agression », « elles n’étaient pas habillées comme il fallait », etc). A ce titre, Les femmes du bus 678 est un film qui s’adresse de manière pertinente à nous aussi, femmes et hommes vivant en France, sur les questions de sexisme et de violence dans notre société, sans alimenter l’idée qu’ « ici » tout va bien parce que cela est pire « là-bas ».

Mais surtout, le visionnage du film neutralise plusieurs idées essentielles du racisme islamophobe. Il montre des figures de femmes avec une réelle épaisseur, un libre-arbitre et une complexité qui met à mal la figure de la femme arabo-musulmane voilée soumise à son mari, emprisonnée dans une société « arriérée » dont l’Occident doit venir l’émanciper. De la même manière, en faisant évoluer ses personnages masculins vers une prise de conscience, le film empêche une lecture raciste et simpliste qui considèrerait l’homme arabe comme un éternel « barbare » machiste.

***

Les femmes du bus 678 réussit à porter un discours nuancé et assez complet sans tomber dans des stéréotypes simplistes. Peignant une société sexiste où les violences envers les femmes sont banalisées, le film suit le quotidien de trois femmes qui décident de se rebeller contre l’ordre patriarcal et de lutter ensemble pour faire respecter leurs droits. C’est leurs voix fortes et leur persévérance qui éveillent la conscience et l’empathie de certains hommes endormis par leurs privilèges afin qu’ils deviennent des alliés à leur cause. Malgré la situation désastreuse dont il est fait état des lieux, Les femmes du bus 678 porte un message d’espoir : il est possible de lutter pour changer nos sociétés patriarcales.

Arroway

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20 réponses à Les femmes du bus 678 (2010) : un appel à lutter contre nos sociétés patriarcales

  1. Merci beaucoup pour cet article.
    J’ai beaucoup aimé ce film à sa sortie, il m’a marquée et je suis contente que vous le mettiez en valeur ainsi. Je trouve qu’il est passé un peu inaperçu. (je ne sais pas s’il a fait beaucoup d’entrées en France).

    Je me souviens que la scène où Fayza surprend une femme dans le bus qui « jouit » des attouchement m’avais beaucoup impressionné à l’époque. J’avoue ne pas trop savoir comment prendre cette scène, car pour moi, elle signifie (dans le film) qu’il serait possible pour certaines femmes de prendre du plaisir à ces attouchements…C’est évidemment noyé dans tout le reste du propos soutenu par le film, mais quand même, quelque chose me gène. Je ne sais pas ce que vous en pensez ?

    • Bonjour Lison,
      il me semble qu’une partie de l’article répond à votre question :

      « Ainsi, Fayza explique les agressions dans les transports en rejetant la faute sur les femmes non-voilées qui porteraient des tenues trop sexy comme Nelly et Seba, qui exciteraient la concupiscence des hommes en mettant en avant leurs charmes et les laisseraient les toucher. Seba contre-attaque en désignant les « idées rétrogrades » supposées des femmes comme Fayza. Ne restant pas sur cette explication simpliste, le film montre peu après une scène où Fayza surprend dans le bus une femme voilée comme elle qui ne réagit pas lorsqu’un homme se frotte à elle. Culpabiliser les femmes sur leur apparence vestimentaire semble donc bien une fausse piste.  »

      Quant à moi, j’ai une autre réponse. Le film rend compte, dans cette scène, d’une réalité : oui, il y a des femmes, comme elle, qui aiment celà.

      On le voit: alors que la place assise devant elle devient libre, elle préfère rester debout, au même endroit… On peut raisonnablement penser que c’est une minorité, mais là n’est pas le problème, je m’en expliquerai plus bas.

      Il se peut par ailleurs que l’homme qui colle à la femme lui plaise, et qu’elle ne réagirait pas de même avec n’importe quel homme. Mais on n’en est pas sûr, on ne sait pas si elle l’a même vu ou entendu.

      Mais le problème qui est soulevé là par le film, à mon avis, est le suivant: peu importe qu’une minorité (ce qui est vrai) ou une majorité (ce qui est faux) de femmes aiment se faire frotter : il y en a à qui ça ne plait pas . Et un voyageur (donc un homme) ne devrait donc pas prendre le risque de s’adonner à cette activité s’il est dans l’incertitude, s’il ne connait pas par avance le consentement de la voyageuse. Mieux vaut éviter une probable atteinte à la volonté et au corps d’autrui et éventuellement manquer un moment de consentement mutuel plutôt que de tenter sa chance sans être averti au préalable de l’acquiescement de la personne.

  2. Pascal Gottesmann

    Ce beau film est une ode à la liberté prise des femmes. Le XXIeme siècle sera paritaire ou ne sera pas. Toute forme de racisme est révoltante mais la misogynie me révulse peut être encore plus car c’est le rejet non pas d’une minorité mais de la moitié de la population mondiale. Alors OUI il est bon qu’elles se battent chaque fois qu’elles se sentent humiliées, rejetées, menacées. Et surtout qu’elles n’oublient pas que les hommes qui les rejettent ont tout simplement peur de perdre la suprématie masculine qui a prévalu pendant des siècles. Et bien ils la perdront.

    • Toute forme de racisme est révoltante mais la misogynie me révulse peut être encore plus car c’est le rejet non pas d’une minorité mais de la moitié de la population mondiale.

      Vous vous rendez bien compte qu’en disant cela vous sous-entendez que les personnes racisées (ie non-blanches) sont une minorité dans le monde, ce qui n’est absolument pas le cas ?

      • Pascal Gottesmann

        Les personnes racistes sont minoritaires dans nos sociétés occidentales. Le racisme est le rejet d’une minorité au sein de sa propre société. Mais, oui le rejet s’étend à toute la communauté ce qui fait une grande majorité de la population.
        Et la société française n’a pas attendu l’arrivée d’immigrants « racisés » pour être racistes puisque les Espagnols, Portugais, Italiens, Polonais…ont été abondamment rejetés au début du XXeme siècle tout en étant blancs.

  3. Si on suit cette définition, l’apartheid et la politique coloniale des états européens entre le XVIème et XIXème siècle n’avaient rien de racistes, puisque les populations opprimées et discriminées étaient majoritaires.

    • joffrey pluscourt

      Putain merci!
      Je rajouterais les stiggmatisations des classes populaires, dont beaucoup ici doivent faire partie car elle est majoritaire.

      Les mecanique racistes sont basiquement la justification irrationnelle de discrimnations existentes et ne pouvant etre comprises rationnellement par ceux qui en profitent (meme si elles peuvent etre interiorisees par les dominés suite à la pression sociale).

      Moi j’aime bien cette ilustration meme si j’inverserais a titre perso les étapes 1 et 5:

      https://www.youtube.com/watch?v=64KQnmNPAGM#t=15m30

      Conférence gesticulée de la coopérative du Vent Debout, de et par Pablo Seban. http://www.vent-debout.org
      Filmée au Café Boissec de Larbey – http://www.sacdebilles.fr/

      @arroway: merci pour avoir mis en avant ce film.

  4. Marc-olivier pelletier

    Enfin un vrai film féministe. Sérieux je vais le regarder un jour. Je vous rappelle que je suis un homme en plus. J’ai une idée critique. Je ne me souvient pas du titre, mais il y a une épisode de family guy qui parodie à mort la violence conjugal. Il y a une scène où le frère de la victime dit carrément à elle que c,est ça faute si elles se fait agressé parce qu,elle se laisse faire et elle quitte son marie violent se trouvant dans la même sale en attendant ça. Il faux aller voir sur youtube et taper animation atrocity doggy poo. Ce n,est pas la vidéo, mais recherché sur ça chaine parmi ses plus récente vidéo et cliquez sur sa vidéo de family guy.

  5. mathias poujol_rost

    Merci pour votre analyse. Le chapô m’a poussé à voir le film.

    Je viens de le voir en VOST EN, puis de lire toute l’article ; des films féministes réalisés ou écrits par un homme, ça ne court pas les rues…

    Film très fort et utile (contrairement aux grosses productions divertissantes qui dominent le marché). Malheureusement peu connu, il mérite évidemment d’être montré au collège ou lycée.

    Il est aussi important de noter que le scénario tente d’impliquer les hommes, en évitant donc la carte du féminisme « strict » (que du PdV des femmes).

    • Bonjour,

      qu’entendez-vous par « féminisme « strict » (que du PdV des femmes) » ?

      • Je pense qu’il veut dire un féminisme où les femmes seront forcément montrées comme parfaites et les hommes comme de gros abrutis ou des brutes incapables de changer et qu’il faut vaincre et non pas raisonner. Il y a beaucoup de films qui adoptent ce schéma-là mais ce n’est pas du féminisme, c’est de la misandrie. C’est comme de la misogynie sauf que ce sont des femmes machos envers des hommes et pas des hommes machos envers des femmes.

    • Je pense que tu parles d’un faux féminisme où les femmes seront forcément montrées comme parfaites et les hommes comme de gros abrutis ou des brutes incapables de changer et qu’il faut vaincre et non pas raisonner. Il y a beaucoup de films qui adoptent ce schéma-là mais ce n’est pas du féminisme, c’est de la misandrie. C’est comme de la misogynie sauf que ce sont des femmes machos envers des hommes et pas des hommes machos envers des femmes.

      • « Il a beaucoup de films qui adoptent ce schéma-là mais ce n’est pas du féminisme, c’est de la misandrie ».

        Est-ce que tu as des films en exemple ? Je n’ai pas l’impression de connaître énormément de films qui rentrent dans cette description, et je dois dire que tout propos parlant de misandrie me met sur mes gardes. La misandrie est au féminisme ce que le racisme anti-blanc est à l’anti-racisme…

        • http://www.lecinemaestpolitique.fr/malefique-trois-pas-en-avant-un-pas-en-arriere/
          En général, le premier film qui me vient à l’esprit est celui-là. Le film a beau être très progressiste-le méchant est un patriarche malfaisant-et féministe sur certains points comme le souligne l’article sur le fait de détourner le mythe de l’amour courtois et de la bravoure des chevaliers-qui est en réalité une ruse pour faire souffrir les femmes physiquement et moralement et leur voler leur puissance-ou le soutien de femme à femme pour combattre le patriarcat qui opprime les femmes et leur permettre de retrouver leur fierté et amour propre ou montrer des fées qui ne savent pas du tout gérer une enfant-l’instinct maternel n’est pas inné-on reste quand même dans un schéma très basique femme=gentille, homme=méchant. Les hommes sont montrés comme naturellement violents et cupides (l’article le souligne d’ailleurs comme un point négatif pour plusieurs raisons) alors que les femmes, malgré les défauts de certaines, sont montrées comme naturellement gentilles et généreuses. Si à un moment, elles peuvent faire preuve d’égoïsme et de méchanceté, c’est uniquement parce qu’elles ont été victimes des hommes méchants qui les ont fait souffrir, pas à cause d’elles-mêmes. De plus, les deux seuls personnages masculins gentils sont effacés: l’un est un corbeau transformé en humain par la protagoniste principale qui devient le sidekick de l’héroïne qui, même s’il est digne, se réduit à un rôle secondaire d’aide précieuse et le deuxième est un personnage inutile qui ne fait quelques caméos et on se demande vraiment ce qu’il fait là.
          Il y a donc du féminisme mais malheureusement mélangé à de la misandrie.

          • Les hommes sont montrés comme naturellement violents et cupides (l’article le souligne d’ailleurs comme un point négatif pour plusieurs raisons) alors que les femmes, malgré les défauts de certaines, sont montrées comme naturellement gentilles et généreuses.

            J’ai un peu du mal avec l’emploi du mot « naturellement » ici : une bonne partie du film montre quand même Maleficent pas super gentille, gentille tout de même…


            Si à un moment, elles peuvent faire preuve d’égoïsme et de méchanceté, c’est uniquement parce qu’elles ont été victimes des hommes méchants qui les ont fait souffrir, pas à cause d’elles-mêmes.

            Dans un film qui dénonce le patriarcat – et remettons-nous dans le contexte actuel, il n’y en a pas des masses et certainement pas des aussi distribué que Maleficent -, cela ne me paraît pas exagéré de montrer, pour une fois, l’oppression patriarcale et ses effets. Quant à déduire du film que Maléficent ne fait preuve de méchanceté qu’à cause des hommes, je pense que c’est un choix de lecture : personnellement, puisque le film montre comment Maleficent se rend compte des *ses* erreurs avec Aurore, et comment elle revient sur ses choix, j’ai l’impression qu’on peut en déduire que le personnage garde son libre arbitre sur sa manière de réagir aux trucs moches qui lui sont arrivés.


            De plus, les deux seuls personnages masculins gentils sont effacés: l’un est un corbeau transformé en humain par la protagoniste principale qui devient le sidekick de l’héroïne qui, même s’il est digne, se réduit à un rôle secondaire d’aide précieuse et le deuxième est un personnage inutile qui ne fait quelques caméos et on se demande vraiment ce qu’il fait là.

            Pour une fois, les hommes n’ont pas les premiers rôles… est-ce une si mauvaise chose ? Si l’on veut rétablir l’équilibre en terme de représentation dans un nombre fini de productions cinématographiques, il faut donner des premiers rôles aux femmes, mais aussi en retirer aux hommes. Prendre d’un côté pour donner de l’autre et atteindre un équilibre… C’est comme la prise de parole : dans un groupe, si on veut pouvoir écouter Machine, il va falloir que Truc apprenne à se taire un peu…

        • Oui, tout ça marche très bien mais ce n’est pas ça qui me gêne, c’est le fait qu’on reste dans quelque chose de trop simple qui n’est pas tellement expliqué et surtout qui est dans l’idée « Mesdames, soyez fortes contre les hommes. Ils sont tous comme ça MAIS SURTOUT n’essayez pas de les changer parce qu’ils sont nés tels quel. Au pire, tuez-les. » Comme le dit l’article
          « dans Maléfique, on retrouve un certain essentialisme qui associe la féminité positive à la nature et la virilité négative à la culture. Mis à part Diaval, seul personnage clairement masculin à être associé à la Lande, tous les hommes du film sont issus d’une civilisation décadente, alors que les femmes (Maléfique et Aurore) sont présentées au contraire comme proches de la nature. Cette dichotomie est hélas très simpliste. Elle limite les deux genres à des caractéristiques divergentes et si mettre en valeur le féminin est positif, le faire en limitant ledit féminin à un idéal inchangé naturel de pureté sauvage est vraiment réducteur[…]on voit donc Maléfique accomplir une première démonstration de magie en réparant une branche d’arbre. Réparer, soigner, est spontanément associé aux femmes avec le « care ». Maléfique est la protectrice de la Lande mais certainement pas un seigneur, ce qui est présenté par le film comme positif mais crée une dichotomie entre souveraineté masculine, violente et avide de conquête, et souveraineté féminine harmonieuse et douce. Par là, le film tend à essentialiser des caractéristiques socialement désignées comme « masculines » ou « féminines ». Aurore, l’autre femme du film communique avec une biche et les créatures de la Lande sans difficulté, les trois fées ont des costumes de fleur. Les femmes sont donc proches de la nature dans un univers naturel harmonieux par opposition aux hommes qui sont cupides et violents sans qu’on n’explique le pourquoi du comment. Les hommes seraient donc naturellement des brutes et les femmes naturellement plus douces. La violence de Maléfique, comme nous l’avons dit, est toujours une réaction à la violence « naturelle » des hommes.Cette idée d’une violence masculine innée est évidemment rédhibitoire puisque faire de certaines qualités ou de certains défauts le propre d’un genre ou de l’autre est terriblement limité et nie la part de construction sociale là dedans. Cela déresponsabilise aussi certains hommes qui « n’y peuvent rien s’ils sont violents puisqu’ils seraient nés comme ça » et de fil en aiguille on accuse les victimes de viol et non leurs violeurs qui n’y peuvent rien puisqu’il serait naturel pour un homme d’être un ignoble individu.Par la suite, après le viol symbolique de Stefan, elle se coupe de cette nature verdoyante et riche. Ses habits deviennent noirs et la nature de la Lande flétrit et ne retrouvera ses droits qu’avec Aurore envers qui Maléfique éprouve des sentiments maternels « naturels » voire « essentiels » à « la femme ». Ainsi, Maléfique s’accomplit en tant que femme forte mais surtout en tant qu’entité naturelle et maternelle ce qui la cloître dans un rôle essentialiste. Femme forte, oui mais proche de la nature et de sa « nature de femme maternelle et protectrice. »
          Et le seul personnage masculin positif mis en valeur, ce n’est pas un homme né homme, c’est un corbeau donc proche de la nature aussi qui évolue auprès des femmes. L’autre, c’est un Prince qui a à peine trois lignes de dialogue. C’est quand même une vision un peu simple mais surtout, l’image que ça transmet, c’est que les femmes s’accompliront seulement si elles combattent les hommes physiquement et pas intelligemment. Alors que la plupart des idées de Maléfique sont intelligentes. C’est dommage. Ce n’est pas parce qu’on né homme qu’on deviendra violent par la suite. C’est idiot de penser ça. Est-ce que ça voudrait dire qu’on doit se débarrasser de tous les hommes pour la sécurité des femmes? N’importe quoi. Ensuite, le fait que les femmes soient toutes proches de la nature est une idée idiote. Je suis une femme et je ne me sens pas proche de la nature. Ce n’est pas un séjour à la campagne qui fait je vais vouloir me mettre à jardiner dès que je vois une fleur. Ensuite, il existe des hommes très doux. En gros, la vision féministe de Maléfique est très bonne sur certains points mais aussi très erronée sur d’autres et elle peut en devenir misandre et c’est pour ça que je trouve que ce film ne marche pas dans sa globalité.

          • Le film est essentialisant mais pas misandre : cette idée des hommes naturellement violents, soumis à leurs pulsions, etc, c’est un produit du patriarcat. Du coup, je dirai que le film a un discours féministe qui ne va pas assez loin, qui reste dans un essentialisme, mais ce n’est pas pour autant un discours misandre : dans le système patriarcal dans lequel on est, dénoncer les méfaits de ceux qui ont du pouvoir n’est pas du sexisme inversé.

            La discussion est partie sur ce film en particulier, mais est-ce que tu en as d’autres en exemple (vu que tu disais qu’il y en avait « beaucoup »), pour voir s’il y a vraiment une tendance ?

  6. Bonjour,

    Ce film me pose question sur deux points.
    – Il est diffusé en France au début de l’année 2012, et bien qu’il ait été réalisé avant la révolution égyptienne de 2011, il me semble participer à une orientalisation du sexisme. Car même si, comme vous le soulignez, le thème abordé vaut aussi pour la Françe, il n’en reste pas moins qu’il n’est pas question de la France dans ce film, mais de la societe égyptienne, vue depuis la France.

    Par ailleurs, je m’interroge sur la disparition du voile chez les personnages féminins des classes moyennes et supérieures, et cela même si l’occidentalisation des classes hautes des nations arabes semble une realite. De quelle manière cela participe de l’impérialisme culturel et raciste occidental ?

    Qu’en pensez vous ?

    Pique.

    • Bonjour,

      – Il est diffusé en France au début de l’année 2012, et bien qu’il ait été réalisé avant la révolution égyptienne de 2011, il me semble participer à une orientalisation du sexisme. Car même si, comme vous le soulignez, le thème abordé vaut aussi pour la Françe, il n’en reste pas moins qu’il n’est pas question de la France dans ce film, mais de la societe égyptienne, vue depuis la France.

      Je ne comprend pas votre question, étant donné qu’il s’agit d’un film écrit et fait par un réalisateur égyptien, avec des acteurs et actrices égyptiennes, à destination d’un public égyptien…

      Par ailleurs, je m’interroge sur la disparition du voile chez les personnages féminins des classes moyennes et supérieures, et cela même si l’occidentalisation des classes hautes des nattions arabes semble une realite. De quelle manière cela participe de l’impérialisme culturel et raciste occidental ?

      Je pense qu’il ne s’agit pas d’un sujet traité plus que cela par le film. J’ai l’impression qu’il traite du voile comme il traite des cheveux : en tant que vêtement/ornement/attribut physique porté par des femmes. A strictement parlé, le film ne montre pas la « disparition » du voile chez les deux persos de classe moyenne et sup, mais leur absence chez elles et dans leur famille. Je pense que les pratiques du port du voile sont plus complexes, que ce n’est pas qu’une histoire de classe sociale, sans compter qu’elles varient aussi avec le temps. Il faudrait confronter la vision du film avec des données sociologiques sur le port du voile en Egypte à la période où il a été réalisé pour pouvoir en tirer une conclusion viable.

      • Bonjour,

        Ce que je souhaitais souligner, c’est finalement la possibilité d’interroger politiquement le film en tenant compte uniquement du point de vue de la situation politique française et non l’intention du réalisateur. Pour faire court il me semble que le film peut aussi être interpréter de la manière suivante:
        – il montre une société égyptienne structurée par le sexisme
        – le film est diffusé en France
        – or, en France, il existent des discours politiques qui disent grosso-modo le sexisme, c’est les autres.
        – Donc ce film peut servir à exemplifier les propos de personnes politiques et médiatiques pour qui le sexisme, c’est les autres.

        Par ailleurs, vous avez indiqué un point qui me semble très important (et qui reste une question pour moi), c’est l’importance de tenir compte de l’intention du réalisateur, (c’est-à-dire de la manière dont il a construit le film, avec qui et pour montrer quoi)pour analyser/interpréter le film.
        Je me pose en effet la question de savoir s’il existe des limites à l’interprétation des films, c’est-à-dire des interprétations qui ne tiendraient pas assez compte des intentions du réalisateur ?

        Pique

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